Une tornade tellement puissante qu’elle en a ravagé le scénario
Après Pompéi en début d’année, place à un film catastrophe un peu plus contemporain. Au pays des clichés narratifs, Black Storm s’ajoute allègrement avec la seule volonté d’offrir quelques frissons à un public affamé d’un genre assez rare au cinéma (quand ce n’est pas Asylum et ses potes qui les produisent à la chaîne pour la télévision). Et en ce sens, Black Storm réussit pleinement sa mission : celle de proposer un déluge de sensations et d’effets-spéciaux époustouflants. Annoncé implicitement comme un ersatz de Twister, Black Storm est un film tempétueux convaincant et (es)soufflant sur le plan visuel, bien au-dessus de toutes les sorties Direct-to-Video faisant la part belle aux dérèglements climatiques. Entre tous les blockbusters du mois d’août, Black Storm se cale timidement dans la programmation mais ravira les fans nostalgiques de Twister et Le Jour d’Après.
Après avoir réalisé le cinquième volet de la saga Destination Finale et accessoirement supervisé les effets-spéciaux d’Avatar, Steven Quale persiste dans la veine d’un cinéma catastrophe et entreprend de réaliser ce projet de vrai-faux remake de Twister à l’aube où les Etats-Unis subissent depuis plusieurs années des tornades toujours plus dévastatrices. La bonne idée du Monsieur -qui s’avérait d’abord déroutante- est d’aborder le point de vue exclusif des héros -petits hommes face à l’immensité de la Nature- par le biais d’une mise en scène caméra à l’épaule et parfois found-footage. A nouveau (cf. Chronicle), le procédé ne tient pas sur la longueur et le réalisateur doit avoir recours à de très nombreux plans fixes extérieurs pour bien faire prendre conscience de la grandiloquence des tempêtes qu’il filme. Tout comme le fait que même dans les moments les plus difficiles, il y a toujours une personne présente pour filmer. Un peu grotesque. Mais il ne s’agit là que de rechigner et finalement, ce choix délibéré d’impliquer le spectateur fonctionne à un certain niveau et on s’imagine que le film pourrait être une formidable vitrine pour une expérience en 4D. Black Storm est un film dont la communication a toujours mis l’accent sur le frisson que provoque le visionnage de l’impact de la Nature sur la civilisation. En témoigne le dernier trailer qui captait les réactions des gens devant les films ainsi que les différents tweets post-projection. Pas de mensonges sur la marchandise, ce qu’on est venu voir, c’est de la pure destruction urbaine par Dame Nature et du coup, de quoi est capable Steven Quale en termes d’effets-spéciaux et d’intensité pour nous faire frissonner.
Si les CGI et fonds verts se ressentent quelques peu, il serait mensonger de dire que le film n’est pas impressionnant et qu’on s’en prend plein les mirettes. Un véritable déluge s’abat sur cette petite ville des Etats-Unis et chaque séquence va toujours plus loin. Steven Quale s’égare parfois dans quelques moments crépusculaires pour notre plus grand plaisir, notamment par le biais de ce passage au-dessus des nuages, loin de la tempête, au plus près du soleil … avant de retomber brutalement sur la terre ferme et ravagée. Un bref instant de poésie au pays des tornades dévastatrices. Mais des quatre-vingt-neuf minutes que le film dure, on retiendra ces quelques séquences d’apocalypse notamment l’impressionnante destruction d’un aéroport, performance visuelle implacable.
Pour donner un sens à ces effets spéciaux, le scénariste John Swetnam nous gratifie d’une galerie de personnages plutôt caricaturaux renforcés par des séquences prévisibles et une terrible impression de déjà-vu. Un fils en conflit avec son père qui partira à sa recherche, un garçon amoureux, une mère loin de sa fille pour le travail, un documentariste obnubilé par la captation de la moindre image d’une tornade et enfin deux rednecks débiles qui veulent faire le buzz sur Youtube. Quatre points de vue s’offrent nous afin tour-à-tour de nous plonger dans le drame familial, la romance, la tragédie et la comédie lourdingue. Très concrètement, on n’est vraiment pas loin de Twister en ce qui concerne le ton du film, entre drame et humour. Deux têtes d’affiches viennent se greffer au casting de Black Storm à commencer par le trop-rare Richard Armitage (Thorin dans les Hobbit) qui joue un directeur adjoint d’un lycée et père de famille strict ainsi que Sarah Wayne Callies que les amateurs des séries Prison Break et The Walking Dead reconnaîtront assurément. Strict minimum au niveau des performances tant elles s’avèrent lisses et sans personnalité. Il faut dire qu’un scénario aussi vide et caricatural ne plaide pas en leur faveur. Par moment, le film s’égare dans quelques réflexions de comptoirs sur l’écologie, le devoir de l’homme de protéger sa planète, la solidarité et les générations futures. C’en est tellement naïf que ça en devient touchant.
Black Storm est donc le film catastrophe impressionnant et décérébré qu’on attendait. Une expérience qui ne peut que se faire au cinéma pour profiter pleinement des sensations proposées. Si le scénario est d’un vide abyssal, Black Storm a néanmoins le mérite de proposer des effets-spéciaux dantesques et il faut reconnaître que l’on aura dû attendre longtemps avant de se voir proposer une réactualisation de Twister aussi efficace. On n’a qu’à dire que ce Black Storm sera le plaisir coupable de ce mois d’août. Et c’est déjà bien suffisant (et très bien payé).