Ce « Blackbird » est plutôt une bonne surprise et une belle oeuvre entre film-réflexion sur l'euthanasie et chronique familiale.
Lilly, jouée par Susan Sarandon, dont la maladie s’aggrave, a décidé en accord avec sa famille, de mettre fin à ses jours alors qu’elle a encore toute sa lucidité et d’avoir recours à l’euthanasie, son mari étant médecin.
Elle décide donc de rassembler une dernière fois ses proches lors d’un week-end pour un adieu le plus paisible et serein possible.
On navigue tout au long du film entre comédie (malgré le sujet, grave s’il en est ; et cela donne un ton plus léger, moins pesant) et drame mais Roger Michell le metteur en scène arrive à maintenir avec subtilité le cap entre rires et tristesse, parfois sur le film du rasoir il est vrai.
L’autre écueil qui se dressait inévitablement et qui me pose davantage problème, d’où un petit bémol que je mets au film, est la difficulté à trouver le bon équilibre entre les deux moteurs de Blackbird, à savoir un film engagé en faveur de l’euthanasie et une chronique familiale et parfois le liant, l’emboîtement entre les deux facettes ont un peu dû mal à se faire même si globalement le tout reste cohérent et convaincant (mais en voulant mener de front les deux le réalisateur se perd parfois un peu en chemin et certaines scènes sont plus faibles que d’autres ou s’éternisent un peu).
Susan Sarandon et Kate Winslet arrivent à tirer de belle manière leur épingle du jeu mais certains acteurs sont un peu en retrait. Car dans ce huis clos familial, presque théâtral, l’environnement extérieur est absent et comme dans toute chronique familiale qui se respecte, les querelles, les conflits, les non-dits, les rancoeurs refont surface...Même si l’on n’atteint évidemment pas ici l’intensité au vitriol d’un Festen par exemple, qui reste la référence du genre.
La famille que l’on découvre dans « Blackbird » est typique de la classe aisée « bobo » américaine libérale (dans le sens de permissive), celle qui a fait Woodstock, fume des joints et possède une villa luxueuse… ce qui pourra dérouter (un film sur l’euthanasie en France serait sans doute réalisé très différemment).
Mais là où Blackbird sort son épingle du jeu et montre son humanisme est dans le réquisitoire et la réflexion qu’il porte sur l’euthanasie qui doit, sous contrôle strict évidemment, être avant tout une affaire de consensus, personnel d’abord, puis familial et médical. Mourir dans la dignité doit être un luxe accessible à tous ceux qui le souhaitent.
Le film, avec beaucoup de finesse, montre bien la dimension humaine du « problème » et apporte sa (belle) contribution au débat…et rien que pour cela il mérite d’être défendu.