Until eventually, one day he gets somebody in the White House that embodies it.

Un film que j’avais malheureusement raté au cinéma, et je ne peux pas m’empêcher d’avoir encore cette petite déception après l’avoir vu. Parce que ce film est grandiose, ce film est superbe, ce film est puissant. Certes, je n’ai pas vu tant de films de Spike Lee que ça au final, mais je préfère BlacKkKlansman à Malcom X par exemple, sans doute parce qu’il est plus digeste sans pour autant amoindrir son impact global. Parce que si le film se regarde plutôt facilement, surfant sur un genre à la limite de la comédie policière (à la limite, parce que ça reste quand même basé sur des faits réels), la fin vient tout chambouler et nous rappeler le sujet même du film. Une énorme claque qu’on se prend en pleine poire et qui ne laisse pas indifférent.


Bien sûr, comme tout film basé sur des faits historiques, il est plutôt prévisible dans ses rebondissements et dans le schéma global de l’intrigue, mais il n’en reste pas moins très efficace dans son propos. Il est très bien rythmé, très bien maîtrisé également. Il tient son bout et ne le lâche pas jusqu’à la fin, nous plonge dans l’Amérique des années 70, et dresse un portrait extrêmement incisif sur le KKK. Et à ce sujet, là où le film excelle, c’est qu’on pourrait croire à une satire de « l’Organisation », mais il n’en est rien : ce film nous montre à quel point ces membres sont haineux mais surtout stupides, et à quel point ils sont stupides dans leur haine.


À quel point ils sont englués dans leurs préjugés, à quel point leur vision est biaisée, à quel point ils essayent de forcer le monde à entrer dans leur prisme. Le film nous montre à quel point ce sont des fanatiques, mais il nous fait tout aussi bien comprendre que le fanatisme est bien souvent basé sur du vent, et que seules les personnes faibles d’esprits s’y adonnent. Comment leur stupidité se transforme en haine et à quel point celle-ci peut devenir violente sans aucune raison. Et c’est en ça que le film est le plus efficace, en plus de tacler là où il faut.


Car son intrigue, au final, reste très classique dans la forme. C’est une comédie qui se base beaucoup justement sur les parallèles avec la situation actuelle, n’hésitant pas d’ailleurs à y faire des clins d’œil faciles, sur un fond policier. Les personnages sont très bien écrits, ce qui en fait la deuxième force de ce film, et les héros sont très attachants. Par de petits détails, on finit par s’y attacher, à être investi émotionnellement dans cette enquête. La fin en sera d’autant plus jouissive, parce que parfaitement amenée, mais la véritable force de Spike Lee ici est de ne pas en faire la conclusion.


Oui, elle peut paraître un peu « happy-end », mais Spike Lee enchaîne tout de suite avec la véritable conclusion de son intrigue qui nous rappelle avec toute l’horreur possible que cette histoire n’est pas finie. Que 50 ans plus tard, c’est toujours une question d’actualité, plus que jamais. Que les violences contre les minorités noires sont une réalité encore de nos jours, que la haine continue d’aveugler les mêmes fanatiques, les mêmes abrutis. Mais surtout, on sent tout le désarroi de Spike Lee quand il utilise l’artifice du pay-back et que oui, oui, les Américains ont élu à la présidence quelqu’un comme David Duke.


Le casting est dans l’ensemble très bons, mais je dois admettre que John David Washington et surtout Adam Driver excellent dans leurs rôles respectifs. Chacun a sa manière apporte quelque chose au film pour nous aider à s’y immerger davantage. Ils sont captivants. J’ai beaucoup aimé aussi Jasper Pääkkönen, qui incarne parfaitement toute la paranoïa qui habite les membres du KKK, tout comme Topher Grace pour illustrer leur stupidité, ou Paul Walter Hauser et Ashlie Atkinson pour leur ignorance. Laura Harrier sera le seul rôle féminin qui marquera vraiment, avec Atkinson, et c’est le seul truc qu’on peut regretter : que les femmes n’aient pas plus de place. J’ai beaucoup aimé aussi l’intervention de Harry Belafonte, surtout toute la passion et la force qu’il met dans son monologue (la scène est brillante).


Techniquement, le film est un régal. J’ai adoré la musique de Terence Blanchard, avec des thèmes très simples, mais efficaces. Il y a ce côté un peu film noir par moment, mystère, pour souligner le côté policier, mais ça crée également un rythme qui se colle presque trop bien en fait à la symbolique du KKK, c’est très bien vu. Les décors et les costumes (Ron a de ses dégaines, c’est juste magique) sont superbes, rien à redire à ce sujet. J’ai beaucoup aimé la photographie, car ça reste très claire mais il y a cette petite touche ôcre-brune, très légère quand on est avec Ron tandis que c’est plus clair avec Flip, comme pour souligner la dualité.


Quant à la mise en scène de Spike Lee, c’est un pur régal. Bien sûr, c’est plutôt sobre, mais il y a foule multitude de plans superbement composés, avec la caméra posée exactement là où il faut pour créer la tension ou bien l’apaiser. La dernière scène avec Ron et Patrice est un pur bijou, ce long traveling en arrière pour ensuite zoomer sur la croix en flamme qui se découpe dans l’obscurité. Comme je l’ai dit plus haut, la scène du monologue de Belafonte est un vrai bijou, car elle capture l’intensité de ce discours, mais avec le montage en parallèle avec le KKK, c’est juste superbe. La fin sera d’ailleurs très bien rythmée. Mais dans l’ensemble, Spike Lee délivre là un petit bijou de mise en scène.


BlacKkKlansman est un de ces films qui marquera les esprits. Je regrette de ne pas l’avoir vu plus tôt, car il aurait été sans conteste mon favori pour les Oscars. Il est sans doute l’un des meilleurs films de 2018, et l’un des meilleurs films traitant de ce sujet. Il dresse un portrait juste et efficace de la lutte des minorités, n’oubliant pas grand-chose en fait. Bien plus engagé que Green Book par exemple, je pense que sa conclusion restera l’une des plus marquantes et l’une de plus grosses claques de ces derniers mois. J’ai beau le savoir, me le faire rappeler de cette façon, avec cette force… Je n’ai pas pleuré, mais je suis resté pétrifié de longues secondes après la dernière image. Ce film est un film à voir et à montrer dans toutes les écoles.

vive_le_ciné
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le 26 févr. 2019

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