Juste par pur plaisir égocentrique, ma critique qui n'aura aucune espèce d'intérêt pour quiconque au milieu des 600 et plus autres critiques du film présentes sur ce site.
C'est évidemment mon film culte préféré et mon seul 10 avec "Mon voisin Totoro". Et j'ai beau chercher, je ne vois pas le lien qui fait que ces deux films sont mes deux seuls 10 hormis le fait que je peux les regarder inlassablement avec le même plaisir. Totoro me bouleverse et provoque en moi de puissantes émotions venues du fond de l'enfance, Blade Runner me fascine et suscite chez moi un formidable ravissement sensoriel, presque extatique.
Blade Runner se situe résolument du côté des chefs-d’œuvre esthétiques. Film d'anticipation, il a nécessairement une portée philosophique et politique, et bien que friand de ce genre de discours, ce n'est portant pas cet aspect du film qui me touche et m’intéresse de prime abord.
Il est surtout beau.
Mais comment qualifier la beauté d'un film qui nous montre une Los Angeles de cauchemar, sans soleil et complètement dé-naturée, grouillante, bruyante et sale, rythmée par des psalmodies appelant au consumérisme le plus artificiel et vide et finalement n'offrant que solitude, abandon et relégation ? C'est assez paradoxal.
C'est peut-être la quête effrénée des répliquants, ces clones humains génétiquement modifiés condamnés à une obsolescence programmée qui revendiquent âprement la liberté de l'incertitude quant à leur mort, qui sublime la désespérance ambiante et illumine la noirceur. Car il sont fabuleusement beaux et lumineux, ces personnages iconiques. Zohra, rousse flamboyante en bikini et imperméable transparent qui brise en mille feux de verre une série de vitrines dans sa fuite éperdue. Priss, blonde sensuelle et presque ingénue qui exécute des mouvements de gymnastique avant de finir en poupée désarticulée. Rachael, brune sophistiquée et froide qui dévoile son désarroi et sa fragilité touchante. Et bien sûr Roy Batty, blond aryen au regard d'acier et au corps sculptural qui déclame son épitaphe sans grand sens mais tellement poétique et belle.
Et encore, la musique de Vangelis qui vient souligner de manière si poignante les moments les plus forts du film.
A noter également la performance d'Harrison Ford qui n'est pas un acteur que j'affectionne particulièrement, mais qui ici parvient à incarner une sorte d'anti-héros à la fois désenchanté et en même temps naïvement en quête de sens, moteur de la narration et pourtant jamais vraiment dans la lumière, comme une sorte d'alter-ego du spectateur que je suis.