Comme dirait l'autre : "C'est beau une ville, la nuit".
Et les premiers plans aériens d'un futur très anticipé (ça m'étonnerait qu'on nous sorte des réplicants d'ici 4 ans) d'une Los Angeles surpeuplée et sur-industrialisée, mêlant architectures américaines et pré-colombiennes, nous plongent extatiquement dans un univers sombre et fascinant à la fois. Nous sommes en 1982, et la photographie de Ridley Scott nous met encore aujourd'hui une claque délicieuse.
Le scénario de Blade Runner s'avère des plus simples, voire simpliste : des androïdes esclaves appelés "réplicants" se sont révoltés sur une colonie martienne, et la Terre leur est désormais interdite. Les unités spéciales "blade runner" auront le devoir d'éliminer tout contrevenant... Et c'est Harrison Ford, le meilleur d'entre tous, qui reprendra du service pour les stopper.
La première partie, très intéressante, présente l'univers du film, ainsi que le test de différenciation des réplicants et des humains ; la deuxième aura malheureusement tendance à ralentir le rythme autour d'une idylle naissante non dénuée cependant d'émotion ni d'entreprise (rha quel homme Harrison ! ^^) ; et la troisième, un peu plus plus nerveuse, se conclura quasiment sur une magnifique tirade après quelques facilités scénaristiques cependant...
Ridley Scott, vraiment très en forme, nous offre au-delà des plans aériens précités quelques scènes d'un esthétisme total : les vitrines explosent au ralenti sous le poids d'une jolie danseuse à bout de souffle, les marionnettes sont plus belles et plus agiles que les êtres humains, et la pluie s'abat sur la chevelure peroxydée d'un Hamlet 2.0 - une colombe sur le coeur - tel un poème élégiaque et funèbre à la fois.
Mais quand je parlais de facilités, c'était pour souligner que, quand même, on croirait que les réplicants n'ont vraiment pas envie d'en finir avec le "blade runner", le graciant chacun leur tour pour, soit lui montrer des prouesses gymniques, soit lui montrer qu'ils ont la tête dure...
Evidemment, le dénouement ô combien elliptique tendrait à nous faire croire que c'était l'intention du réalisateur, tandis que l'un des autres points forts de l'oeuvre réside justement dans cette capacité non-manichéenne à nous proposer des "méchants", à l'image du fameux Roy, dont il serait bien inhumain de ne pas comprendre les motivations...
M'enfin c'est quand même un peu dommage ces petits détails sur la fin et ces quelques petites longueurs au milieu, parce que pour le reste c'est une atmosphère, un mystère assez génial qui planent au-dessus de ce pluvieux avenir, et ce jusque dans la bande originale de Vangelis, distillée de manière tellement discrète.
"Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?". Je ne sais pas. Mais chaque "Tyrell Corporation" c'est une certitude, qu'elles en rêvent...
8,5/10