Humain, Réplicant, Film... Fascinants mais imparfaits.

[IL Y A DES VRAIS MORCEAUX DE SPOIL DANS CE BILLET]


Allez, je me lance pour une critique de ce "Blade Runner 2049" (J'aime pas vraiment le mot "critique", d'autant plus qu'un mec plus talentueux et calé que moi appelé "Fossoyeur de films" a déjà mis l'accent sur les aspects les plus importants du film, mais bon...).


Lorsque j'ai su qu'une suite de "Blade Runner" allait voir le jour, ma réaction a été, à peu de chose près, celle-ci : "QUOI ?! MAIS NON ! LES SALAUDS ! LES SALAUDS... !"
Puis, le projet a été mis dans les pattes de Denis Villeneuve et ce qui relevait du désespoir s'est transformé en inquiétude fébrile. Puis il y a eu les premiers trailers...et la hype m'a envahi.


Je ne me suis jamais considéré comme un fan inconditionnel du film de Ridley Scott, même si je le trouve excellent en presque tous points. Il y a ces images, sombres et sublimes, accompagnées de la musique envoûtante de Vangelis. Il y a ce rythme lancinant dont s'inspirera grandement (et pour le meilleur) "Ghost in the Shell", cette aura de mystère. Il y a cet équilibre parfait entre glauque et beauté.
En fait, mes premières inquiétudes vis-à-vis de "Blade Runner 2049" étaient liées à une simple question : "Blade Runner a-t-il besoin d'une suite ?" Ou plutôt : "Qu'est-ce qu'une suite peut amener d'intéressant ?"
En sortant de la salle, je n'avais toujours pas de réponse claire à ce sujet. Peut être qu'écrire sur le film m'aidera à mettre de l'ordre dans mes idées.


Je vais commencer avec le commencement, avec ce qui revient le plus quand on aborde le cas de ce film (et le cas Villeneuve de manière général): "Blade Runner 2049" est beau.
La photographie est magnifique, les jeux de lumières grandioses, les cadres sublimes, transformant chaque scène en un trip métaphysique glacial et fascinant. Allergiques au bleu, s'abstenir.
Cette esthétique est alliée à un rythme lent (trop pour certains) qui fait tomber le spectateur dans une sorte de transe, aussi agréable que déroutante.
A ceux qui se demanderaient si, comme le premier volet, "Blade Runner 2049" est un film d'ambiance, la réponse est oui.
Mais s'il respecte religieusement son grand-frère, il ressemble aussi à son réalisateur.
Difficile de ne pas penser aux décors design et épurés de l'intérieur du vaisseau de "Premier Contact", à la campagne américaine enneigée de "Prisonners", au visionnage du dernier rejeton de Villeneuve.
Alors oui, le film est beau, parfois "trop" beau.
Mais des jolies images n'ont jamais fait un bon film. Quid du reste ? Au hasard, de l'histoire ?


C'est là que les détracteurs interviennent, en partie à raison, même si le film m'a suffisamment fasciné pour que je puisse passer outre certains défauts évidents.
La trame principale de ce nouvel opus n'a rien de très extraordinaire. L'Agent K (Ryan Gosling), un réplicant de la nouvelle génération, traque ses congénères obsolètes. Lors d'une de ses missions, il est amené à enquêter sur une réplicante disparue qui aurait donné naissance à des enfants... Il s'interroge alors sur ses propres origines, sa condition d'androïde, et se lance dans une quête d'humanité. On est sur du classique. Le monde de la SF n'en sera pas ébranlé.
Ceci étant dit, c'est plus dans ses personnages secondaires et dans ses environnements que Villeneuve insuffle de la nouveauté, tout en élargissant l'univers de Philippe. K. Dick et Ridley Scott.
Ainsi, le spectateur peut se figurer le quotidien des habitants de ce Los Angeles futuriste, ce qui donne une crédibilité bienvenue au film. Racisme anti-robots, prostituées, employés à la "création de souvenirs", confusion croissante entre humains et androïdes, publicité agressive... Ce monde fait vraiment peur.
Le personnage incarné par Ana de Armas (clairement le personnage le plus intéressant du film, ce qui rend encore plus honteux son traitement dans la promo) est réellement beau. A la fois glaçante et touchante, l'intelligence artificielle et compagnon de K est une vitrine de la détresse affective qui règne dans cette société. Sa condition de produit de consommation est rappelée au spectateur de manière brutale et cruelle lorsque la forme humaine disparaît au profit d'un simple interface.


Mais ce que Villeneuve gagne en crédibilité et en travail d'ambiance, il le perd en mystère et en puissance de suggestion.
La quête du personnage principale est assez poussive, les péripéties attendues, et les moindres pistes laissées au spectateur sont rapidement explicitées de manière grossière. Le score pachydermique d'Hans Zimmer est assommant lorsqu'il surligne au stabylo des éléments d'intrigue déjà relativement limpides.
Là où le "Blade Runner" de Ridley Scott nous laissait un sentiment de malaise après le visionnage, Villeneuve ne laisse rien inachevé, inexpliqué.
Pour rester dans les points négatifs, certains personnages sont assez mal écrits et/ou exploités.
Jared Leto, par exemple, incarne un riche industriel désireux de créer des réplicants "parfaits". Du coup, pour bien montrer qu'il est méchant, il ne parle qu'en citations pseudo-philosophiques, en références religieuses... Le Lex Luthor de "Batman V Superman" paraîtrait presque soft.
Était-il vraiment nécessaire de créer un "visage maléfique" dans ce film ? Là encore, on regrette amèrement l’ambiguïté du premier volet.


On aborde maintenant le point qui a collé des sueurs froides à tous les fans de "Blade Runner" pendant des mois, le traitement du personnage de Rick Deckard.
Eh ben c'est assez décevant. La confrontation entre les deux protagonistes n'apporte rien de bien intéressant ou intense. On a la désagréable impression qu'Harrison Ford joue maintenant le même rôle dans toutes les suites de ses films à succès, un vieux grincheux goguenard et bagarreur. Du coup, son jeu ne colle pas vraiment avec la noirceur de Deckard.
Par contre, le film est très habile et ne tranche jamais la question réplicant/pas réplicant. Et ça, en 2h40 de long métrage, bah c'est balaise ! Franchement, merci !
Et puis le retour de Deckard nous gratifie d'un plot-twist aussi surprenant que poétique et ça, c'est un super bon point !


Je finirai sur la durée du film. C'est vrai que c'est long, mais je n'ai jamais vraiment décroché, malgré les coups de mou du milieu du film (la quête du personnage principal). Villeneuve et son équipe sont parvenus à créer cette ambiance hypnotique, quitte à parfois "faire du beau pour du beau" qui empêche de piquer du nez.


Je suis ressorti avec des étoiles dans les yeux, le sentiment d'avoir vu quelque chose de grand et décevant à la fois.
Mais très vite, l'impression d'avoir assisté au tour de force d'un réalisateur jusqu-au-boutiste et ambitieux l'a emporté et la déception s'en est allée, comme des larmes dans la pluie...

Créée

le 16 oct. 2017

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Mr_Step

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