Un grand dessein (animé)

9 ans après le premier dessin animé parlant de Mickey, Steamboat Willie, Walt Disney éprouve le désir de progresser dans l'animation, et décide d'entreprendre la réalisation du premier long-métrage animé en Technicolor, d'après le conte des frères Grimm, Blanche-Neige et les 7 nains. Bravant tous les avis négatifs de la profession à l'égard d'un tel projet jugé trop hardi et voué à l'échec, il faillit compromettre à tout jamais la firme qu'il avait créée avec son frère Roy en 1923, mais réussit son pari et put présenter en 1937 ce film qui fut acclamé par le public. C'était une formidable revanche sur les sceptiques.
Ce film est dû au talent et au labeur acharné d'une équipe de 750 artistes qui oeuvra pendant 3 ans sous la direction de Walt Disney. Un million de dessins furent nécessaires pour sélectionner les 250 000 choisis au montage définitif. Le film coûta 2 millions de dollars, une somme considérable pour un dessin animé à l'époque, en mobilisant toutes les techniques connues en cartoon : la bande sonore, la musique (composée par l'éminent Frank Churchill), le Technicolor, mais aussi l'utilisation du procédé Multiplane et celui du Rotoscope inventé par les frères Fleischer pour les Voyages de Gulliver.
Ce qui laisse pantois donc en premier, c'est la perfection de l'animation qui bénéficie des progrès de l'époque et qui deviendra la marque de fabrique du studio Disney. Ensuite, on s'attache forcément aux personnages, et il faut avouer que les 7 nains n'ont laissé personne indifférent parmi petits et grands ; personnellement mon préféré est Grincheux, mais chacun est typé, très différent et si vivant. Il y a aussi la métamorphose de la reine en sorcière hideuse, je crois qu'elle a effrayé des millions d'enfants ; l'idylle avec le prince reste secondaire, elle est même proche de la mièvrerie, mais c'est le propre des contes de fée, et cet aspect ainsi que l'aspect terrifiant voire même l'épouvante avec la reine/sorcière, sont contrebalancés par la cocasserie des nains qui provoquent invariablement le rire dans des scènes devenues inoubliables : le départ de la mine ("Heigh-oh...on rentre du boulot !"), la séance de lavage, la tyrolienne des nains, les baisers sur le crâne... le tout étant toujours merveilleusement souligné par la musique de Churchill.
Ainsi même si le nombre de chansons est déjà conséquent dans ce premier animé long, il faut retenir l'habileté technique qui permit à Disney de l'emporter sur ses rivaux Pat Sullivan et les frères Fleischer, la couleur qui donne une nouvelle dimension, notamment aux décors, une merveilleuse histoire, avec des pics de dramatisation appropriés, et un équilibre mirifique, une alchimie parfaite entre les différentes composantes du spectacle empreint de naïveté et de poésie, c'est sans doute pour ça que Blanche-Neige a gardé une telle place dans l'univers enfantin en marquant durablement son imaginaire. Un chef-d'oeuvre !