Johnston est un aveugle détective, une sorte de mélange de Monck et de Dr House, qui s'est spécialisé dans les "cold case" et qui se fait cependant souvent carotter ses primes par son copain d'enfance Szato, qui a bâti sa carrière sur l'intuition de son pote aveugle. Lorsque Johnston démasque un désaxé qui aime jeter de l'acide sur les gens du haut des immeubles, il fait la rencontre de Goldie, une flic sportive, pas très futée, mais qui est une vraie groupie. Goldie lui demande de retrouver Minnie, qui était sa voisine il y a 10 ans et qui a disparu. Johnston profite de la crédulité de Goldie pour résoudre une autre affaire qui traîne, puis part sur la piste d'un serial killer qui tue des jeunes femmes qui se sont faites larguer. Ils le débusquent, mais Minnie n'est pas dans les victimes. Au cours de l'aventure, Johnston, qui a subi une désillusion en réalisant que la jeune femme qu'il convoitait depuis des années s'était mariée avec Szato, réalise qu'il peut trouver l'amour auprès de Goldie. Ils finissent par retrouver Minnie, dans des circonstances dramatiques.
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Après le si délicieux "Sparrow", après l'étonnant "Vengeance", après le film-tract anti-bourse "Life without principle", Johnny To revient à la comédie romantique sur fond d'enquête dans la pure tradition des séries américaines. Autant dire que le ton est souvent décalé et l'histoire particulièrement imprévisible. Mais To ne transige pas sur un de ses principes : la narration n'est pas forcément linéaire. Et ici, ne nous voilons pas la face : pour apprécier le film, il va falloir faire une confiance aveugle (oui, je sais...) dans le maître.
L'enquête progresse à coup de moments où Johnston s'arrête, frappe des coups de sa canne (un peu comme les trois coups du théâtre), après quoi il se retrouve vis-à-vis avec ses victimes, dans des scènes aux éclairages très contrastés et aux sons étouffés.
Comme toujours, beaucoup de scènes mémorables de ce roublard de J. To.
- Une scène où la jeune flic et le blind detective dansent un tango involontaire pour échapper aux giclures d'acide d'un maniaque. To est toujours aussi bon pour la comédie.
- La scène où il utilise une balle de ping pong pour calculer la surface de l'appart' de son employeuse pour ajuster ses honoraires. Après avoir bien galéré pour trouver les toilettes dans un immeuble qu'il ne connaît pas.
- Un combat entre un aveugle et une femme enceinte aux intentions homicides qui vient de perdre les eaux. Oui oui.
Au départ, je n'ai rien compris à la séquence avec la grand-mère de la petite. Complétement surréaliste. Mais vous verrez que ça sert pour comprendre la suite. Gardez confiance, c'est le moment qui peut faire décrocher du film.
To détourne les séries américaines et leur penchant pour la reconstitution pour en faire un jeu sadique entre l'aveugle et sa compagne-souffre-douleur consentante. Comme les 10 reconstitutions de rupture que Johnston impose à la pauvre Goldie. On prend beaucoup de plaisir à regarder ça, si comme moi on a des penchants sadiques.
Le personnage de Johnston joué par Andy Lau est fort réussi. Excentrique, égocentrique, amateur de bonne chère et de jolies femmes, manipulateur, malicieux, il fait penser à Gregory House (faut dire que la canne...). En face, Goldie, jouée par Sammi Cheng, est très touchante, garçon manqué aux cheveux en pétard, groupie crédule qui devient progressivement féminine. La scène où Johnston découvre, alors qu'elle est inconsciente à l'hôpital, qu'elle est belle alors qu'il imaginait un cageot est fort touchante.
Au niveau musique, To reste dans les influences du cinéma français, le chabadabada, l'accordéon, mais aussi le tango et la bossa nova.
Sans être le chef d'oeuvre du siècle, "Blind detective" fourmille de séquences originales, voire inspirées, qui font que sans le porter aux nues, on le revisionnnera avec plaisir. Et comme beaucoup de films de To, je suis sûr qu'il vieillira bien.