But even with beautiful girls, you, you look at them and that's that.
Les propos de Thomas résument à eux-seuls le sujet premier du long-métrage ; il est question d’illusions, de faux-semblants, et de ce que l’on croit voir, ou plutôt ce que l’on décide de croire.
Le film s’ouvre sur un chahut mené par des mimes grotesques, bien trop distraits pour se préoccuper des alentours et en disharmonie avec ceux-ci, comme détachés du réel. D’emblée, et subtilement, le cinéaste annonce qu’il ne fera qu’imiter le vrai, pour donner une impression. Mais Thomas, photographe à la mode, est tout autant éloigné de la réalité.
Las de son microcosme parce que trop futile et superficiel, il aspire à sonder et comprendre la réalité. Dans cet élan, au gré de ses errements dans un Londres quasi fantasmagorique, il capte l’image d’un couple se chamaillant, et puis se réconciliant. L’instant saisi, en apparence banal, devient avec l’étude inhabituel, presque surnaturel. Tout lui laisse penser qu’il a été le témoin d’un évènement sordide : un meurtre. Content et inquiet tout à la fois ; il fantasme sur cette idée qu’il ait pu s’emparer d’un échantillon de vérité et appréhende l’énigme qui a émergé du bain de révélation.
L’intrigue policière, qui ne prend forme qu’en cours de route, et nous rappelant très largement le cinéma d’Alfred Hitchcock, aide à asseoir la réflexion entreprise par Antonioni. To be, or not to be : tel en est l’enjeu. Une question à laquelle l’artiste et le protagoniste, son alter ego, tâcheront d’y répondre. Et contrairement à L’avventura, de la même famille, l’enquête qui en découle ne s’éclipse pas aussitôt les bases de celle-ci posées.
Le mot de la fin : les silences, que l’on retrouve sans grande difficulté au travers de l’œuvre du cinéaste italien, accroissent la portée des sons, et sans lesquels la magie de la scène finale, où Thomas découvre avec stupeur qu’il existe un monde autre que celui perceptible à l’œil nu, n’aurait été possible.