Bois d'ébène
Bois d'ébène

Documentaire TV de Moussa Touré (2016)

Bois d'ébène, film du Sénégalais Moussa Touré, traite du commerce triangulaire supposément interdit par la Convention nationale en 1794 (et qualifié de crime de lèse-humanité) officiellement rétablit en 1802 par Napoléon alors Consul (décidément un saint-homme). Ce qui est moins connu en revanche c'est la Loi du 15 avril 1818 écrite sous la seconde restauration interdisant la traite négrière mais qui ne fut que très peu respectée en raison de contours flous permettant aux esclavagistes d'échapper à la loi. C'est dans ces circonstances que se déroule le film.
Le décret d'abolition définitive de l'esclavage sera signé sous la deuxième république sous l'impulsion de Victor Schœlcher.


Avec pareil sujet le film ne peut que remporter l'adhésion de son public et avoir le regard d'un réalisateur Africain pourrait donner un point de vue nouveau et différent peu connu du grand public occidental pour qui cette histoire n'a été raconté que par de grosses productions américaines (Amistad et Twelve Years a Slave en tête). Mais voilà, un film, quelque soit son sujet et quelques soient les intentions nobles de son auteur, se juge avant tout sur des critères cinématographiques. Et c'est là que le bât blesse.


En effet, hésitant entre pure fiction et documentaire, le film empêche, par ce procédé, tout attachement à ses personnage principaux. La grande Histoire vue au travers de la petite, ici l'impossible amour entre Yanka et Toriki arrachés de force à leur terre pour aller travailler celle de riches propriétaires aux Antilles, est constamment entrecoupée par diverses voix-off lisant par exemple les lettres glaçantes d'armateurs donnant leurs consigne sur la meilleure façon de transporté la "cargaison". En voulant tout dire et tout montrer, Moussa Touré perd l'empathie de son spectateur qui a l'impression d'écouter une leçon plutôt que de voir une œuvre sensible.


Et c'est fort dommage, le film est techniquement magnifique. La lumière est splendide, les acteurs sont plutôt bons. Et on nous propose des purs plans de cinéma ou l'émotion et le propos passent par l'image, par le montage et non par cette voix-off qui ruine trop souvent l'immersion. On peut également reprocher un traitement trop propre, les corps ne sont quasiment pas meurtris ni par la traversée ni par les sévices infligés. Mais cette co-production France Télévision, destinée à une soirée film+débat en prime-time ne pouvait vraisemblablement pas se permettre de trop secouer le téléspectateur moyen du service public. Ce qui, certainement, explique aussi son format 1h30 trop court pour traiter l'ensemble de l'histoire racontée.


En conclusion, le film pêche par sa volonté d'être à la fois émouvant et informatif et également exhaustif. Il est réellement caviardé par son approche docu-fiction. Et c'est dommage, les parties de pur cinéma sont vraiment intéressantes et belles mais ne justifient pas à elles seules le déplacement en salle.

Jfh_h
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le 5 nov. 2016

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