L'adolescence dans toute sa diversité

Les films sur l'adolescence, surtout les fins de lycée avant d'entrer dans le monde des "adultes", ce n'est vraiment pas ça qui manque. On peut même dire que c'est un genre à part entière. En même temps, une fois devenu.e adulte, c'est généralement la période sur laquelle on possède à la fois le meilleur recul et pour laquelle on ressent le plus de nostalgie (souvent mal placée).

En quoi "Booksmart", premier passage de Olivia Wilde derrière la caméra , parvient-il à se démarquer dans une catégorie déjà bien fournie ?

Déjà, il normalise complètement les relations homosexuelles et lesbiennes (voire la non-binarité). Je n'avais jamais vu ça nulle part, et c'est d'une fraîcheur incroyable, et on souhaite juste que le monde soit comme ça, tout le temps. Sans jugement, sans étonnement, sans mise à l'écart, juste un épanouissement que chacun.e prend à son rythme et selon ses envies et sa maturité.
Hétéro comme homo, tout le monde a du mal à se lancer, à faire le premier pas, à oser aller vers l'autre. Tout le monde a peur de sa première fois, de ne pas être à la hauteur, de se planter, d'être rejeté. Tout le monde désire trouver quelqu'un et être aimé, aussi.
Voir des hommes et des femmes avec une sexualité aussi bien hétérosexuelle qu'homosexuelle rencontrer les mêmes soucis et les mêmes succès avec les autres, je pense que c'est là non seulement un message important, mais plus encore, une étape importante dans la façon dont le cinéma présente le monde dans sa diversité, surtout en mettant en scène des jeunes personnes.

Au-delà de ces histoires de romance, "Booksmart" nous présente aussi un portrait nuancé de la jeunesse actuelle. Il n'y a pas de "losers" et de "winners", le film se montre bien plus sensible en nous présentant les motivations et les caractères des personnages.
Amy et Molly ne sont pas les pauvres filles incomprises qu'on est sensé prendre en pitié. Elles sont un peu les snobs qui ont pris tout le monde de haut et qui se rendent compte qu'elles sont passées à côté de pas mal de choses, d'expériences, et surtout de gens de leur entourage, qui avaient beaucoup à leur apporter ou à bénéficier de leur aide et amitié, les uns comme les autres.
J'ai beaucoup apprécié cette approche des relations humaines, où il n'y a pas de gentils et de méchants, seulement des humains avec des émotions, qui se croisent et s'entrechoquent, et qui ne se montrent pas toujours tels qu'ils sont, pour des raisons toutes aussi humaines.

En termes de réalisation, Olivia Wilde fait un excellent travail, toujours juste dans sa mise en scène et dans les émotions, ainsi que dans le rythme de sa narration, et on ne s'ennuie pas un seul instant. Elle multiplie les lieux, gère plutôt bien les rebondissements, et si je trouve qu'un élément de la fin se règle un peu trop facilement, je me suis laissée emporter par cette histoire d'ados fusionnelles qui apprennent à vivre l'une sans l'autre mais toujours unie, et tous les autres qui se cherchent chacun une identité.
Les deux actrices principales sont sublimes de justesse dans leur jeu et leur amitié, et toutes les figures qui les entourent montrent aussi assez de charisme pour imposer leur personnalité rien qu'avec leur présence, avec une Billie Lourd hilarante et touchante à la fois notamment.

Au final, "Booksmart" tient toutes les promesses, un excellent film moderne sur l'adolescence, sans clichés appuyés et sans jugements, et surtout beaucoup de diversité, et qui s'impose comme une des nouvelles références du genre.