"You know, a bar offers all kind of things other than alcohol."

Si le diptyque Kill Bill allait loin, tout en restant efficace, dans les hommages et autres citations, on pourrait croire que l'étape supplémentaire franchie par Boulevard de la Mort serait de trop. Effectivement, il est dans son intention de nous rappeler les grandes heures du film de course-poursuite en voiture, et ça pourrait s'arrêter là. Mais quitte à rendre hommage, autant parler cinéma. Et ça tombe bien, le méta reste une des activités favorites de Tarantino.


Le personnage le plus représentatif de cet esprit méta est probablement celui donnant le plus de saveur à ce film. Stuntman Mike est, comme son nom l'indique, un cascadeur. De fait, on a là l'archétype du métier exploitant les coulisses du cinéma, et de ce fait les connaissant. Ce n'est pas un hasard s'il brise le quatrième mur. Avec seulement un regard, il nous dit : "Ce personnage va mourir. Je le sais, vous le savez, et vous savez que je sais". Autant par son charisme que par ce qu'il représente, ce personnage est le film.


Et il arrive quasiment sans casse à faire un carnage pendant la première partie du film. Après tout, ces femmes parlaient principalement de leurs conquêtes, et ne connaissent probablement rien des codes et des ressorts du genre de film dans lequel elles sont prisonnières. Contrairement à deux des personnages de la seconde partie du film qui se trouvent être... Des cascadeuses.


Elles aussi connaissent les dessous de leur monde. Elles ont d'ailleurs la vue la plus claire, comparée à la pellicule abimée de la première bande de filles, et au noir et blanc de Kurt Russel. Il est donc finalement assez logique de les voir pouvoir retourner la situation en leur faveur dans le final dantesque du film.


Cette double lecture apporte un certain charme au film (moindre par rapport au concentré de divertissement que certaines scènes nous apportent, de la lap dance au premier affrontement entre Mike et la voiture de Vanishing Point). Ce qui gêne le plus souvent est la longueur étirée à l'extrême de certains dialogues. S'il est vrai qu'ils peuvent paraitre assomants (chacun ira de son propre ressenti), on ne peut que respecter l'intention d'inculquer à un film basé sur l'action des détails aussi croustillants sur les personnalités des personnages que l'on suit. Il serait même presque émouvant d'observer le dialogue épuré par texto de Julia, ou les sentiments froissés de Arlene.


Quentin manoeuvre son film de la même façon que le personnage qu'il joue manoeuvre son bar. La raison principal de notre présence est forcément l'alcool/les courses poursuites, mais rien n'empêche d'apprécier "les femmes, les grandes assiettes de nachos, la compagnie d'individus fascinants comme Warren". Comprendre : "les femmes, les dialogues interminables, la réalisation de QT". On savait le réalisateur bien sûr de lui. Et au fond, on aime ça.


Critique faisant parti d'une rétrospective sur le réalisateur :
http://www.senscritique.com/liste/Retrospective_Quentin_Tarantino/1207072

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le 24 janv. 2016

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