Broadway Therapy plagie tellement, dès son générique, les films de Woody Allen (jazz, New York, références à outrance, jusqu’à Owen Wilson qui jouait parfaitement son petit Woody illustré dans Midnight in Paris) qu’on ressent d’emblée à son endroit un certain malaise : celui de retrouver la même rengaine un peu rance, la même autocitation qui se mord la queue et qu’on retrouve chaque automne avec les marronniers.
Après des débuts un peu laborieux accusant un certain manque d’énergie et de fluidité, le film décolle véritablement grâce à l’arrivée de Jennifer Anniston en psy névrosée : répliques au cordeau, screwball pétillant, Bogdanovich semble enfin à l’aise et entraîne son spectateur. L’univers, résolument décontracté, joue des coïncidences et du vaudeville sur fond de Broadway (en gros, un Birdman qui ne se prendrait jamais au sérieux, ce qui peut occasionner une véritable détente…) multiplie les ficelles assumées du vaudeville, sans toujours atteindre sa cible. Tous les couples infidèles, que les hasards entremêlent se retrouvent dans le même hôtel ou l’identique couloir d’hôtel, et la pyramide des échos s’échelonne avec une certaine jubilation. Les portent claquent et cachent les amants illégitimes, les claques sont distribuées avec équité, et des chiens s’invitent à la danse.
La difficulté d’un tel ballet est d’en maintenir le rythme et l’harmonie, ce qui n’est hélas pas toujours le cas. Tous les gags ne font pas mouche et les comédiens sont diversement impliqués, souffrant clairement des modèles à qui on ne cesse de les comparer explicitement, entre Lubitsch et Hawks notamment. Difficile de rivaliser avec la fraîcheur et l’impertinence de Paper Moon...
Mais c’est peut-être là que le vétéran cinéphile Bogdanovich s’en sort le mieux : par la construction d’un récit sous forme de flashback qui reconnaitrait sa propension à embellir l’histoire pour en imprimer la légende, sa réflexion sur l’illusion et la légitimité du mensonge depuis l’âge d’or d’Hollywood, She's Funny That Way (titre original de cette insipide « traduction » française) est une lumineuse déclaration d’intention. La référence constante au splendide Clunny Brown de Lubitsch le confirme : film hommage, nostalgique, regard sur le passé qui craquelle par moments la naphtaline qui risquait de le figer, il est certes bancal, mais touchant dans sa candeur et son enthousiaste érudition.
(6.5/10)