Rest In Paz
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le 16 août 2014
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En 1969, en plein Vietnam et révolution des mœurs, le western classique n’est plus. Voilà déjà quelques années que Leone et Corbucci ont modernisé le genre en y apposant leur touche européenne, et cette année-là doit arriver The Wild Bunch de Peckinpah, pionnier du Nouvel Hollywood au même titre que Arthur Penn dont le Little Big Man doit sortir l’année suivante. C’est la fin d’une époque, le western traditionnel est terminé, le genre doit se renouveler pour subsister. Quel meilleur script pour illustrer ceci qu’une histoire qui conte la fin de l’ouest sauvage face à l’avancée implacable de la civilisation. Le générique muet à effet documentaire d’époque puis le prologue sépia laissent donc la place à la couleur, les grands espaces, et une vaine lutte contre la destinée. Mais là où George Roy Hill tire son épingle du jeu, variant du classicisme codifié du genre, c’est en y imprégnant à la fois de l’intimisme et un l’humour moderne.
Butch Cassidy and the Sundance Kid, c’est avant tout l’histoire de deux bandits affables, aimés de tous, y compris leurs poursuivants, qui sont désemparés par la radicalité du changement qui s’opère dans la société. Paul Newman et Steve McQueen devaient initialement être le duo, mais ce dernier à lâcher le projet car il souhaitait être l’unique tête d’affiche, laissant la place à un Robert Redford à la carrière encore en recherche du grand succès. Une bénédiction pour le spectateur qui se voit livré une alchimie parfaite entre les deux acteurs, que l'on retrouvera avec le même cinéaste pour The Sting quelques années plus tard. Le film à propulsé Redford sous les feux des rampes, le glamourisant dès son introduction dans un gros plan fixe sur son visage laissant à l’audience tout le soin de se l’imprimer sur la rétine. Le duo crée un genre, le buddy movie, qui ne fera de réelles émules qu’à partir des années 80. Mais déjà là les codes sont en place, les joutes verbales s’enchaînent avec un rythme réjouissant et peu coutumier du western.
Outre l’évidente réussite du casting, le film doit aussi son succès à la vision de son auteur. Pour une œuvre sur la transition, quelle meilleure idée que de revisiter les mythes en se basant sur de réels personnages tout en comblant les trous de leur biographie par des raccords thématiques? Les producteurs poussaient le cinéaste à faire se confronter le duo tutélaire avec la clique à ses trousses, arguant “John Wayne don’t run away”. Mais George savait ce qu’il faisait, et quelle meilleure excuse pour subvertir les attentes du genre que de se baser sur le réel : les vrais Butch et Sundance se sont effectivement barrés en Bolivie, leurs personnages feront de même.
Et si la finalité du récit est assez amère, cela ne dépareille pas avec la tonalité comique de l’ensemble. De scènes de braquages muets qui rappellent Chaplin et Keaton, où l’on croirait presque voir l’image accélérée, à des saillies bien senties, au comique de situation (on pense au dynamitage du train et à l’employé de la compagnie de chemin de fer zélé), jusqu’à l’insertion du désormais culte morceau interprété par B.J. Thomas : Raindrops Keep Fallin' on My Head qui apporte une césure novatrice, un calme avant la tempête qui sert par ailleurs à dépeindre la légèreté de Butch. Et le reste de la bande-son, du plutôt rare Burt Bacharach, emporte le spectateur dans son élan postmoderne qui crée un décalage avec le genre.
Échec critique mais succès public phénoménal, Butch Cassidy and the Sundance Kid est une anomalie, un film unique dans le paysage du western. La voie prise par George Roy Hill n’a été que peu empruntée, le far west voyant ses rênes prises par des disciples du Nouvel Hollywood tels que Clint Eastwood, Sydney Pollack ou Michael Cimino, et ce jusqu’au crépusculaire Impitoyable qui a rabattu les cartes pour les décennies suivantes.
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Créée
le 11 sept. 2024
Critique lue 6 fois
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