Produit par Eric Tsang (Infernal Affair) et réalisé par Qian Renhao qui fait parti de la nouvelle génération taïwanaise, Buttonman est un film à l'ambiance étrange, qui met parfois un peu mal à l'aise, non pas par des scènes violentes ou gores comme aurait pu le suggérer le scénario, mais par des scènes assez dures psychologiquement parlant et des personnages complètement meurtris par ce qu'ils font.
On va suivre la vie de Wei, incarné par un Francis Ng (Infernal Affair 2) impeccable, fidèle à lui même, dont le travail dans les triades consiste à passer derrière les meurtres pour tout nettoyer, s'occuper du corps, se débarrasser des preuves, puis toucher l'argent, sans jamais se soucier de qui a été tué ni même pourquoi. Une tranche de vie durant laquelle on y voit un personnage qui souffre de son métier, finissant tous les soirs dans un bar à enchainer les verres et les cigarettes, affalé sur le comptoir, ivre mort, comme pour oublier sa journée... Ou retrouvant un peu de réconfort dans les bras d'une belle prostituée, jouée par Terry Kwan (Turn Left Turn Right, Shamo), chez laquelle il revient régulièrement, avant de recommencer dès le lendemain à nettoyer les traces d'un meurtre dans lequel les victimes sont souvent mutilées et couvertes de sang. Une vie de désespérance la plus totale qui malgré l'énorme quantité d'argent gagnée va forcer Wei à décrocher et à former un successeur. Une sorte de destruction intérieure à petit feu en quelque sorte...
Comme on le constate rapidement, le film est d'une grande noirceur. Même si on ne les voit jamais ou presque, on sent des meurtres violents, tout comme la violence que doit s'infliger le personnage de Wei pour découper parfois les corps lorsqu'il faut les faire disparaitre. Cette violence a beau être suggérée, on sent bien que même s'il reste toujours efficace et professionnel, Wei souffre. Mais au delà des meurtres et de leur nettoyage, ce sont les à cotés qui sont les plus violents moralement.
On nage en plein milieu des triades et de la prostitution et le réalisateur n'hésite pas à montrer le pire, une prostituée obligé de faire le tapin accompagnée de sa petite fille de 3 ou 4 ans car elle ne peut pas la faire garder, et qui va la mettre dans la pièce juste à coté ou simplement dans un placard pendant qu'elle fait son « affaire » ou une petite gâterie à ses « clients ».
La réalisation de Qian Renhao conforte cet aspect noir et très désespéré du film. La mise en scène est tout simplement superbe, avec des éclairages de toute beauté appuyés par des filtres qui donnent un charme certain à la ville où se déroule l'histoire. Quian Renhao aime à s'attarder sur les visages de ses personnages, principalement celui de Francis Ng dans des plans toujours très réussis où on sent toute la solitude du personnage. Le réalisateur veut montrer qu'il est doué avec sa caméra et dans la mise en scène en général et ça se sent.
Mais à trop s'attarder sur ses personnages et sur des longs plans fixes, le film souffre d'un rythme un peu lent. Ce n'est clairement pas un film d'action, il n'y a d'ailleurs qu'une ou deux scènes qui bougent un peu, mais malgré la courte durée, 1h20, on a parfois tendance à trouver certaines scènes un peu trop longues.
Néanmoins Buttonman se regarde sans déplaisir, l'ambiance sombre qu'essaie de mettre en place le réalisateur fonctionne à merveille et malgré une ou deux scènes un peu moins réussies, on passe un très bon moment en compagnie d'un Francis Ng.