A la façon d’Haneke, Lanthimos arrive en prétendant proposer un cinéma-réel qui filmerait l’infilmable (et l’infilmable, avec les bas instincts strictement dressés qui vont avec, c’est très pasolinien, alors les fans citeront Pasolini), mais la démonstration, autiste et sociologisante, d’une irritable absence de vie et de spontanéité, fait ressembler le film à un sketche des Inconnus à propos de l’exercice du naturalisme frigide au cinéma.
Atteignant un point de désincarnation totale, Canine épuise par son absence totale d’humanité. Derrière ce qui semble vouloir apparaître comme une légèreté à toute épreuve en contrepoint du sujet, la vacuité. Cela lui a sans doute paru évident, mais ça ne l’est peut-être pas tant ; que les personnages soient aussi creux et artificiels n’était pas un passage obligé ; l’ordre établi peut toujours avoir des failles, d’ailleurs on croit difficilement qu’une atmosphère concentrationnaire puisse absorber ainsi toute parcelle d’humanité ; en outre, les parents, eux, ont-ils seulement encore une pensée, ont-ils seulement des désirs au-delà de leur conservatisme ? Non, ils n’éprouvent rien sinon le sens du devoir et l’instinct de survie de leur système. C’est un peu court.
Sinon pour une bouffonnerie de circonstance, Lanthimos ôte de son film tout plaisir de cinéma ainsi que toute attractivité intellectuelle, pour un délire moral bidon, un truc laconique qui aspire à vouloir tout signifier derrière son langage crypté. (..) Ca pourrait aussi parler des ambiguités qui peuvent exister dans certaines familles quelque peu esseulées (dans le fond, Canine c’est un peu l’hypertrophie de l’inceste affectif).
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