Misérabiliste, dégoulinant de pathos, triste, lamentable vie d’un enfant pauvre à la dérive ? Non.
Parce que ce qui est incroyable dans Capharnaüm, c’est que même si Zain n’a plus rien, ni parents décents, ni frères et sœurs, ni argent, ni nourriture, ni toit ; même si Zain perd la seule qui prend soin de lui ; même si Zain doit abandonner injustement ceux qu’il aime ; même si Zain a 11 ans et qu’il connaît déjà trop bien les travers de l’homme ; Zain espère, rêve, aime et veut vivre. Et il me semble que c’est ça l’enfance. Alors le « petit homme », bien que trop endurci, vivant chaque jour la misère de l’homme, frappant de ses petits poings plein de rage l’injustice du monde, garde ses grands yeux noirs d’enfant de 11 ans. Et c’est pourquoi Capharnaüm n’est pas misérabiliste, dégoulinant de pathos, triste et lamentable mais authentique, juste et beau. Et c’est pourquoi on pleure oui, mais après le générique. Parce qu’on voit à la dernière image Zain sourire. Et là, on sait : on sait que Zain est un enfant, qu’il grandit et que la vie est encore longue. Alors on pleure, non parce que le film finit mais parce que la vie peut commencer ; et on sort de la salle avec un sourire et les yeux mouillés.