Un petit séjour en Algarve, c'était l'occasion de voir ce film commémorant la Révolution des Œillets avant de découvrir les affiches des événements officiels encore sur les murs d'Albufeira après le 25 avril. Le Portugal célébrait cette année les 50 ans de la fin de la dictature de Salazar, dont j'ignorais à peu près tout, mais je me souvenais de la sortie de ce film de Maria de Medeiros au début du siècle. La scène d'ouverture, monstrueuse de cruauté, ne donne pas du tout le ton de la suite : on y voit les atrocités commises par l'armée portugaise sur les populations civiles de sa colonie. Glaçant. Ensuite, tout est bien plus bon enfant, et cette rupture pose un peu question. Comme si le soulèvement militaire avait eu un petit côté amateur et sympathique, de tout jeunes gens ayant simplement décidé de dire non. Possible, il se peut que ça soit effectivement leur innocence bafouée qui ait naturellement emporté l'adhésion d'un peuple exténué par l'autoritarisme. Et finalement, c'est la leçon qu'il me semblerait opportun de tirer de cette histoire : les régimes autoritaires épuisent les gens, les soumettent à des pressions que l'être humain n'est pas fait pour supporter, les laissent exsangues à chaque fois. Comment fait-on pour l'oublier sans cesse et recommencer à réclamer l'intervention d'hommes forts quand les choses ne prennent pas une tournure idéale ? Les hommes forts, cultivés ou pas, n'apportent que des solutions inhumaines, on l'a suffisamment vu par le passé. Pourquoi tendre le bâton pour se faire battre et applaudir encore et encore les discours de fermeté qu'on nous propose en toute décomplexion ces derniers temps ? Faudra-t-il encore que les autorités imposent à une jeunesse insuffisamment vigilante des expédients qui la laisseront désabusée et lui feront renier ses aspirations les plus dignes ? Parfois, on dirait bien que oui. D'ailleurs, le parti d'extrême droite portugais a le vent en poupe, alors que les aînés se souviennent encore des ravages de la dictature. Ce qui est incompréhensible pour les uns devient immanquablement une chimère pour les autres, dirait-on. On finit par se demander si un jour on parviendra à éteindre la violence. Alors, si ce film est loin d'être un chef d’œuvre, au moins pose-t-il le problème dans des termes simples à appréhender.

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le 2 juin 2024

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