Tout est bien qui finit mal

-- Cette critique contient des spoilers --

Liberté ou sécurité ?

En principe, pour le patriarche joué par Viggo Mortensen, la réponse à cette question devrait être tout à fait évidente. Un personnage aussi instruit, et décidé sur la manière dont il faudrait vivre et éduquer ses enfants a évidemment un avis mûrement réfléchis et, désormais, tout à fait tranché sur la question. Il est indéniable qu'il préférera la liberté, et cela malgré les conséquences (qu'il aurait dû conscientiser bien avant) de celle ci. Mortensen (son personnage, pas l'acteur) aurait dû savoir que la liberté se fait au détriment de la sécurité, et que donc être libre implique d'être plus propice à se confronter au danger. J'insiste là dessus puis-ce que son personnage nous est tout de même présenté comme une espèce d'intellectuel (qui se soucie quand même d'allier corps et esprit) mettant la dialectique au cœur de sa vie, en tant que pilier fondamental.

Mortensen aurait dû prendre la chute de l'une de ses filles du toit de leur grand père, de manière bien plus sage, de manière bien plus « stoïcienne ».

Et malheureusement, ce n'est pas le cas du tout. Ce qu'il se passe, c'est qu'il remet toute sa philosophie de vie en question et finit par abandonner ses convictions pour se conformer.

Ce qu'on doit donc retenir du film, c'est qu'il vaut mieux se plier, se standardiser, quitte à devenir un médiocre pour je cite "ne pas être une bête de foire". Conformez vous mes amis, devenez obèses, mangez des Miel Pops, du McDonald et allez subir la propagande de l'éducation nationale sinon vous serez moqués. Rasez votre barbe, coupez vos cheveux, rentrez dans le rang. L'avis du groupe est plus important que le votre. Le groupe a toujours raison, même quand il a tort. Parce qu'en définitive, malgré ses bonnes intentions, et le fait qu'il répète plusieurs fois pendant le film que les actes sont plus importants que les mots, le père de famille finit par offrir ses enfants au capitalisme.

Bon, passons le désaccord que j'ai avec le scénariste. Imaginons qu'il ait raison et que j'ai tord. Il n'en reste pas moins que la manière dont il traite les choses manque tout de même cruellement de subtilité. Jamais le père n'aurait dû abandonner aussi facilement le fruit de ses lectures et de ses réflexions pour se conformer ainsi au groupe alors que toute sa vie d'adulte semble en découler. Il aurait été, à mon sens, bien plus pertinent et INTERESSANT(lol) de présenter le conflit interne d'un homme à la fois rebelle, et à la fois père de famille. D'ériger le portrait d'un Mortensen torturé, en pleine dissonance cognitive, trop attaché à sa vision de la pédagogie et de la société, malgré les conflits qu'il développerait avec sa famille, et les malheurs qui continueraient de s'abattre fatalement sur ses enfants. Le film aurait été beaucoup plus sombre, je vous l'accorde, mais aussi beaucoup plus mature.

Malgré tout ce que j'ai écris plus haut qui peut laisser penser que j'ai détesté le film, j'ai vraiment passé un bon moment en le regardant. C'était drôle, beau, parfois inventif et très touchant. Je suis juste terriblement déçu par la manière dont il se conclut, et par ce qu'implique sa conclusion .