Cargo
5.4
Cargo

Film de Ivan Engler et Ralph Etter (2009)

La SF Suisse ? Dure. Ils devraient peut être se concentrer sur les coucous et la raclette.

Passé l'effet de curiosité légitime et la première partie du film, plutôt contemplative et moyenne dans son ensemble, on déchante vite. Le film enchaînera de nombreux clichés et d'innommables maladresses pour finir sur une fin franchement bâclée et consensuelle. Dommage, parce qu'il y avait pourtant de l'idée.
ATTENTION SPOILERS.

Une idée de départ intéressante, donc, à défaut d'être très originale. Mais dans le domaine du film de genre, comme j'aime à le dire, le renouvellement est d'autant plus difficile que les maîtres sont déjà passés par là. Donc de mon point de vue, hormis une approche graphique novatrice ou franchement délirante, (ce qui n'est pas forcément un mal) le scénario comportera un certain nombre de lieux communs, et je ne vois pas forcément ça comme quelque chose de préjudiciable non plus; du moment qu'on ne reste pas le nez dessus pendant une heure trente.
Et justement, la première partie du film pose calmement les bases (c'est le moins qu'on puisse dire) d'une Science Fiction crédible et d'un univers cohérent, emprunte de petits clins d'oeil par-ci, par-là, ce qui est assez agréable. Le côté Dystopique est également posé dès le départ, pas de surprise, on a donc une chance sur deux à l'arrivée. On sent enfin dans ce début de film un manque évident de moyen, mais une ambition certaine, saupoudrée d'un savoir faire côté réalisation. Bref, ça ne gâche rien.
On a donc de bonnes raisons d'espérer passer un bon moment.
Et ma foi, ça se déroule plutôt bien. Les plans sont filmés avec efficacité, la photographie est soignée malgré quelques petits cafouillages discutables mais sans grande importance. Les effets sonores sont anecdotiques.
Côté effets spéciaux et décors, on sent les nombreuses références: Alien pour le décors des couloirs, Aliens pour le design du vaisseau, Moon ou la Planète des Singes pour les scaphandres... Et on pourrait sans doute encore en aligner un certain nombre en fonction de sa culture et de son coup d'oeil. Mais je le dis encore une fois, il s'agit de petits clins d'oeils discrets, qui m'ont donné un bon a priori de départ, parce qu'ils brossent le fan de cinéma de genre dans le sens du poil.
Non, là où ça me gêne, c'est plutôt côté cohérence. Parce qu'on se rend vite compte que ça ne tient pas à grand chose. Si l'histoire est pour le moment crédible dans son ensemble, les personnages sont clairement le maillon faible du projet.
L'héroïne du film, Laura Portmann, est assez froide et lisse, tout comme son acolyte, Samuel Decker. Mais à la rigueur (et en étant bon public) on colle avec l'orientation lente et posée de cette première partie, tout en permettant d'assoir et de développer l'historique ou le relationnel des principaux protagonistes. Also, warum nicht.
En revanche on voit déjà arriver les gros clichés avec le reste de l'équipe. Notamment avec les personnages du Commandant, de Prokoff et Vespucci. Ces personnages sont franchement bâclés, et joués comme des pieds par leurs acteurs respectifs. Anna Lindbergh, le méchant de l'histoire, s'en sort avec les honneurs malgré un manque de profondeur flagrant et des répliques... Hum... Disons stéréotypées.
Mais jusque là, j'ai trouvé le film encore assez agréable, ma note oscillant entre le six et le sept étoiles. C'est dire si j'ai été bon public. De manière générale, je n'ai pas de problèmes avec les films au rythme lent, du moment que l'histoire est cohérente. J'aime par exemple la filmographie de Mamoru Oshii, qui est pourtant assez difficile d'accès à cause de son rythme et de son ambiance. (Patlabor, Avalon, Ghost In the Shell ou le scénario de Jin Rô) Mais il faut que je rentre dans l'histoire, ou à défaut, au moins que l'ambiance ou le côté graphique m'interpelle suffisamment. Ou à défaut, qu'il y est deux ou trois décolletés plongeant et quelques blagues salaces pour faire passer la pilule.

Et je suis rentré dans cette partie. Mais hélas, il y eut la seconde. Hélas. Et là, ce fut le drame.

Le drame car on passe d'un ensemble moyen-bon (selon sa sensibilité) à quelque chose de franchement mauvais.
Les maladresses en tout genre s'accumulent jusqu'à plomber définitivement le film. Par exemple la direction artistique se borne à filmer l'action avec un détachement qui confine à l'obsession. Comme si le réalisateur ne voulait surtout pas s'impliquer dans l'action, ce qui donne un résultat franchement bizarre, comme si on regardait un combat entre deux fourmis avec une loupe, bière à la main.
Si lors de la première partie ça se tenait parce que l'action y était anecdotique, ici on aurait eu besoin de beaucoup plus de dynamisme et de nervosité pour relever un peu les phases anxiogènes. Le phases rythmées de la trame sont filmées en plans larges et sur des séquences très limitées. On n'a donc pas le temps de se rendre compte quil se passe un truc que c'est déjà finit.
Aucun jump scare, aucun effet de style pour pimenter un peu la sauce. Switzerland qualität hein Herr. Ivan Engler passe à mon sens complètement à côté des scènes qui pourraient faire décoller son film; on s'y emmerde à plein régime avec le Coucou Suisse qui compte les loooooongues minutes. Il ne se donne même pas la peine d'exploiter le côté anxiogène du vaisseau (pourtant facile à faire: MERDE, on a les décors d'Alien !) ni les clichés qui font plaisir ! (les traditionnelles poursuites sans fin avec fusillades à la clef, les poursuites dans les couloirs sombres, la petite musique qui fait sursauter: Nein nein nein)
Bon. C'est TROP mou. Et franchement, là, ça ne passe plus.
En plus les personnages deviennent tous caricaturaux à l'extrême, allant de paire avec le jeu des acteurs, passant d'anecdotique à vraiment mauvais.
Anna-Katharina Schwabroh a un mal de chien à rendre crédible son personnage d'héroïne discrète mais courageuse, et ses faiblesses d'actrice vous sautent littéralement à la figure. Tout sonne faux, à commencer par ses rares expressions. Cette femme n'a rien de crédible dans son jeu, elle est totalement creuse ! Les deux mécanos enfoncent encore le clou, surtout vespucci, qui devient risible à force de se voir tirer les traits de rebelle bourru. Drecker est fidèle à lui-même, plat, et Lindbergh est tout aussi lisse que l'héroïne...
BREF: ON SE FAIT CHIER DANS CETTE AVENTURE.
Avec tout ça, on a le droit à une petite panoplie de rebondissements assez risibles:
* Une amourette entre Decker et Portmann amenée de manière tellement maladroite que ça en devient gênant.
* Le personnage de Yoshida dont on ne sait rien ou presque, et qui devait sans doute être le personnage trouble de l'histoire, vous fait bien marrer avec le recul: La manière dont il est développé est tellement succincte et maladroite qu'on n'y croit jamais, tout comme les deux mécanos, dont on ne sait pas très bien s'il sont de connivence avec Lindbergh ou simplement opportunistes. (ou alors complètement cons)
* Le réveil du méchant qu'on n'attendait pas du tout. (Nein nein nein)
* Le côté trafic d'êtres humains maladroit et décousu (Ich bin überrascht)
* La cartouche qu'on ne trouve pas et qu'on prend le risque de sortir quand même dans le vide interstellaire. (brrr, je me demande ce qu'il va se passer, tiens...)
* Et la liste est longue. (Allez, je vous épargne ça)
Vous l'aurez compris, le film cumule donc à peu près toutes les maladresses et cas d'école qui peuvent déclencher les rires nerveux dans son scénario.
Mais le meilleur reste pour la fin: les maladresses liées au manque de préparation ou au script.
Exemple: la petite fille qui ouvre la bouche toute seule alors qu'elle est dans le coma, attrapant presque elle même la canule, le manque d'inertie dans l'espace, les ellipses douteuses, les costumes improbables une fois sur RHEA (la robe et les chaussures de Portmann, sans rire, c'est juste pas possible. Même en Suisse chez les Grisons on ne doit plus porter ça à moins de vouloir se faire pendre)...
À ce point de l'histoire, çà commence vraiment à faire beaucoup.

Donc pour ceux qui ont survécus à la fin du film, un seul constat: ça se délite complètement malgré de bonnes idées. J'ai eu l'impression qu'on piochait sans cesse des bribes de scénario au petit bonheur-la-chance, sans jamais rien développer réellement, ce qui est limite insultant. Tout reste en suspends, tout le temps, et sent le vite fait mal fait. Même la fin, qui pour le coup ne ramène pas grand chose mais sur laquelle je fondait de grands espoirs.
Je peux donc dire honnêtement que ce film est une bouse qui s'ignore, et qu'il ne passe pas loin de la purge innommable.
amjj88
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le 21 févr. 2014

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