Two Lovers
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Mélodrame d'apparence classique, Carol pourrait rebuter par son sujet sérieux à l'esthétique datée. Il n'en est rien car même si l'homosexualité se révèle très présente à l'écran (l'attraction des deux femmes est explosive à chaque regard qui se croise), paradoxalement elle n'est pas attaquée frontalement par le réalisateur. Par exemple, le film ne traite pas de la difficulté du coming out: Carol assume ses préférences et Thérèse parait plus hypnotisée par Carol que torturée par ce nouveau désir, transgressif. Elle demandera même naïvement à son compagnon s'il a déjà été amoureux d'un homme, inconsciente du choc que sa question pouvait provoquer à l'époque. De même, le film n'est pas militant à la manière de Pride (de Matthew Warchus) et n'explore que très peu l'homophobie d'un entourage comme c'était le cas dans le très beau film de Corsini, La belle saison. Au fond, Carol ressemble à la première partie de La vie d'Adèle de Kechiche: du coup de foudre au premier baiser/scène d'amour, la caméra se focalise sur les deux femmes pour saisir un regard, un souffle, une parole qui circule entre elles. Film sensoriel donc, où l'on embrasse le point de vue de Thérèse sur Carol (comme Adèle sur Emma dans le Kechiche, mais sans les gros plans) et où l'on tombe tous irrémédiablement amoureux de Carol, femme fatale à la fois dominante et séduisante.
Dans de nombreux films classés "à thématique LGBT", l'initiation est un des motifs récurrents. Ici, l'initiation au plaisir saphique de la jeune Thérèse par l'expérimentée Carol n'est pas perçue comme telle. Les deux femmes nous paraissent finalement à égal niveau car elles sont simplement deux êtres humains qui tombent amoureux l'un de l'autre au même moment. Bien plus, Todd Haynes présente le personnage de Carol, aussi fatal soit-il, comme solitaire et embourbé dans un divorce catastrophique avec son mari, ce dernier ayant découvert les penchants homosexuels de sa femme. Elle se révèle fragile, désarçonnée par son "ange tombé du ciel" (Thérèse), selon ses propres mots. Carol est donc magnifique à la fois dans le désir qu'elle suscite à chacune de ses apparitions, à la fois dans le désir qui l'anime elle-même lorsque Thérèse est à ses côtés. Et c'est en jouant sur ses deux niveaux que Todd Haynes réussit à immortaliser ce que peut être l'amour.
Carol est un film à voir absolument pour se sentir amoureux, pour voyager, pour apprécier ce que le cinéma peut agiter en nous !
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Créée
le 2 mars 2016
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