La vision harcelée de Carrie White est tellement crédible qu'un modeste seau constitue l'enjeu principal ici présenté. Une vision où les icônes religieuses sont défigurées, où on prie devant des impostures. Une vision permettant de se maquiller coquettement dans une chambre glauque au possible à l'aide d'un miroir brisé.
La maison familial, censé être lieu de repos, est ici une autre épreuve que devra surmonter l'héroïne maltraitée. En effet la demeure semble être celle de Dracula et la mère (portrait craché de Dave Mustaine au passage) en tant que fervente fidèle n'aura pas une grande diversité de dialogues à soumettre aux divers personnages.
Entre la méchanceté gratuite ambiante, l'humanisme rare essentiel à la survie et les réactions du rôle tenu par la grandiose Sissy Spacek, le film est en mesure de déployer toute sa palette de situations sur une solide heure et demi dans une harmonie presque totale.
Presque oui, car seules les vingts dernières minutes souffrent de la trame de Stephen où les facultés métapsychiques de Carrie et l'irréel explosent, des aspects pourtant en retrait durant le reste du long-métrage. On peut remercier ce bon vieux Brian car ces rares scènes - nanardesques si données à un réalisateur moins habile - sont sauvées par :
- L'OST phénoménale qui, parfois, semble parodier Psychose (1960) ou s'arme d'un xylophone pour nous happer de suspens en suivant lentement un fil suspendu (traitement des coulisses et de la cachette déjà grandement exploré et exploité dans Phantom of the Paradise (1974)
- La réalisation comprenant notamment le travail sur les split-screen, le contraste beige apaisant / rouge satanique (présent dès l'affiche) et l'humour tragico-macabre propre au cinéaste.
Je ne définirai pas le film comme sobre, les thématiques étant clairement exposées et compréhensibles, mais plutôt libre à interprétation concernant le message final et généreux sur les détails foisonnant à l'égard du spectateur investi.
Nos yeux se retrouvent à fixer cet objet filmique d'une manière semblable à ceux suivant une corde suspecte dans le décor. On ne peut que rester pantois d'admiration devant ces successions de plans remplis d'imagination concocté par le faiseur d'ambiance ultime.