Ce qui est intéressant quand on se lance à la découverte d'un réalisateur en choisissant d'en faire une rétrospective, c'est que l'on est parfois très surprit. Rien ne m'avait préparé à ce que j'allais vivre avec "Casino".

Martin Scorsese est un maître lorsqu'il s'agit de raconter une histoire de manière pessimiste. Pourtant ce qui est surprenant dans son cinéma, c'est qu'il nous dépeint les péripéties de personnages antipathiques tout en nous faisant aimer ces derniers. C'était le cas dans "Les Affranchis", ça l'est aussi dans "Les Infiltrés", et aux vues des critiques sur "Le Loup de Wall Street", il semblerait bien que ce soit la même chose. Pourtant jamais cette manière de procéder ne devient redondante, au contraire chaque film a une vraie personnalité et un univers.
Dans "Casino", Scorsese reprend les mêmes ficelles, et il nous dépeint ici le destin de deux amis dont la relation est maudite, complètement vouée à l'échec car il s'agit-là d'un film pessimiste, ce qui n'exclut en rien sa beauté cependant. Nous sommes là devant la pellicule flamboyante de lyrisme d'un réalisateur profondément humaniste, c'est dans cette dimension très personnelle que réside toute l'intensité du cinéma de Scorsese.

En plus d'être la dernière collaboration entre le réalisateur et son premier acteur fétiche, alias Robert De Niro, le film est une sorte d'apogée de toute la première partie de la filmographie de Scorsese. Si bien que ce dernier nous gratifie ici d'un film empreint d'un lyrisme saisissant, mais également empreint d'une vraie émotion. Véritablement amoureux de ce trio d'acteurs, le réalisateur filme les corps et rend les dialogues une nouvelle fois très savoureux. "Casino" est riche en répliques cultes et en scènes d'anthologie, telles que la scène d'ouverture par exemple, ou bien le monologue de De Niro sur les images muettes du Tangiers Hotel, c'est d'un onirisme fou, qui touche presque au divin. Scorsese ne filme pas seulement des hommes, mais également l'univers dans lequel ils évoluent. Un monde d'apparence, glamour et pourtant si froid, ce qui vient faire écho à ce couple tordu interprété par De Niro et Stone. Les intrigues principales ont évidemment leur importance, mais le film s'admire déjà tellement en tant que fresque que l'on oublierait presque pourquoi ces personnages en arrivent où ils sont. Nous somme bien ici face à un cinéma de contemplation, un cinéma de l'image et des mots car il y a cette narration omniprésente. On nous raconte une histoire, et on nous la raconte de la manière la plus belle que le cinéma peut le permettre.

Les acteurs forment un trio monumental, De Niro excelle une fois de plus dans la peau de cet homme si détestable mais bouleversant, face à cette folle furieuse qu'est Sharon Stone dans ce personnage. On aime ce couple, on ne l'admire pas, mais il est beau dans sa détresse. Joe Pesci quant à lui campe un salaud de première absolument génial, un maître de l'humour noir empreint d'une folie douce et survoltée à la fois.
Comment ne pas parler des musiques également, il s'agit probablement ici de l'oeuvre la plus lyrique du réalisateur. Les nombreux morceaux collent parfaitement, cette introduction avec Bach est tout simplement inoubliable.

Bref, inutile de s'attarder plus longtemps, il faut voir "Casino". Non il faut vivre "Casino" ! Scorsese signe ici une œuvre flamboyante, un film époustouflant, véritable pierre angulaire de toute une filmographie, et un au-revoir en apothéose à son acteur fétiche avant de se tourner vers Leonardo DiCaprio. Une vraie merveille, un chef-d’œuvre !

Créée

le 25 mars 2014

Critique lue 568 fois

8 j'aime

E-Stark

Écrit par

Critique lue 568 fois

8

D'autres avis sur Casino

Casino
Sergent_Pepper
9

Les dieux sont faits

On l’a assez reproché à Scorsese : Casino reprend sur bien des points l’esthétique qui fit des Affranchis un chef d’œuvre. Recours aux voix off, saga mêlant documentaire et faste d’une ample mise en...

le 15 nov. 2023

157 j'aime

7

Casino
TheBadBreaker
10

Le loup de Las Vegas

Quand on pense à Martin Scorsese, on pense souvent à des films de mafieux. Ce thème correspond tout à fait au réalisateur, qui a complètement compris et décrit bien que l’homme peut être un loup pour...

le 7 juin 2014

66 j'aime

1

Casino
Grard-Rocher
8

Critique de Casino par Gérard Rocher La Fête de l'Art

C'est sous les strass de Las Vegas, dans les années 1970, que le syndicat des camionneurs décide de confier à Sam "Ace" Rothstein la direction du casino "Tanglers" dans le but de faire de cet...

52 j'aime

11

Du même critique

American Horror Story
E-Stark
7

Les monstres et les hommes.

Un casting de choix pour une série originale, "American Horror Story" se démarque du reste des séries grâce à son traitement particulier, et à la singularité de ses diverses saisons. SAISON 1: Murder...

le 21 mars 2015

63 j'aime

18

Edward aux mains d'argent
E-Stark
10

"Hold me." , "I can't."

Edward aux mains d'argent est l'un des films les plus emblématiques de Tim Burton, mais c'est aussi une œuvre qui marqua une génération de spectateurs. Révélant ainsi au monde le génie d'un...

le 31 mai 2013

56 j'aime

7

Mommy
E-Stark
10

"Ça n'arrive jamais dans la vie d'une mère, qu'elle aime moins son enfant."

Auréolé du Prix du Jury au Festival de Cannes 2014, "Mommy" le cinquième long-métrage de Xavier Dolan n'a pas manqué de faire parler de lui. Le réalisateur compte probablement autant d'admirateurs...

le 9 oct. 2014

40 j'aime

6