Fascinée par le personnage et son oeuvre, j'ai adoré ce documentaire basé sur des images d'archives et des interviews. Quelle drôle d'allure se dit-on tout d'abord ! Quel bordel il y a chez lui ! Pourquoi tous ces chiens, et que fait donc là ce perroquet ? Puis soudain, monsieur Céline se met à parler.
Son "flow" subjugue : il va, il vient, il vire sans cesse dans la conversation, abordant des souvenirs d'enfance, des réflexions sur la littérature ou encore des considérations sur l'écrivain et l'homme qu'il était. Il parle presque comme il écrit, ce qui le fait osciller entre une parole très crue ou lyrique sans ménagement. Je vous jure, il m'arrivait par moments d'oublier que j'étais devant un écran à regarder un documentaire tellement j'étais captivée par sa voix et ce qu'il disait.
Des fois, son regard se perd dans le vague puis soudain se plonge dans celui de l'interviewer avec tranchant et hauteur. On ne sait s'il est fou, prétentieux ou génial. Touchant, délirant, pertinent, ce monsieur était une véritable énigme qui l'a amené au rang des mythes littéraires maudits à l'instar d'un Romain Gary ou d'un Baudelaire. Comment ne pas s'intéresser à son cas ? J'ai du regarder trois ou quatre fois ce documentaire pendant mes années de licence de lettres avec appétit, parce que même si Sainte Beuve disait que l'homme n'était pas l'écrivain, je trouvais qu'ici la marge était relativement fine : il me semblait mieux comprendre son parcours et ses romans grâce à ses témoignages et quand j'ai fini par lire mort à crédit, quel plaisir j'ai eu pour ma lecture à entendre sa vraie voix supplanter la mienne avec son rythme et ses intonations.
En bref, on pourra dire ce qu'on voudra sur Céline, sa vie et son oeuvre demeurent des sujets d'étude passionnants. J'invite quiconque à l'écouter parler ou mieux à le lire, car si on enlève ses pamphlets débiles, il s'agit d'un écrivain superbe.