C'est l'été, et pour les types comme moi qui ne passeront pas leurs congés sur la Côte d'Azur, on se fait chier. Mais par grâce, à la manière du 29 février qui revient tous les 4 ans, cette année on a de l'escrime à la TV. On ne comprend rien aux règles, on ne connaît pas la différence entre le fleuret, le sabre et l'épée, mais ce n'est pas grave parce que dans tous les cas, on est content si notre tireur français a touché son adversaire après sa parade-riposte ! Oui, ce sont les Jeux olympiques. Et pas n'importe lesquels ! Ce sont les JO de Paris, rendez-vous compte, ça n'arrive qu'une fois par siècle ! Encore moins fréquent que la comète de Halley. Et il nous fallait donc une cérémonie d'ouverture pour fêter ça ! Et quelle cérémonie n'a-t-elle pas été ! La presse internationale a été dithyrambique à son sujet estimant que c'est l'une des plus grandes cérémonies d'ouverture de tous les JO de l'ère moderne, rien que ça ! Mais chez nous, parce que nous sommes des éternels insatisfaits à la gueule bien pendue, on a trouvé des choses à dire - la grande culture française assurément. Et comme je ne veux pas faire déshonneur à cette grande culture du coup de gueule, j'ai décidé de m'y mettre aussi.

Enchanté

Pour la clarté du résumé critique qui va suivre j'ai décidé de manière très originale de suivre le fil des 12 tableaux qui ont été successivement présenté. Un grand fourre-tout général mais qui n'est pas dénué de cohérence comme on va vite le constater.

Cette cérémonie - je passe sur la courte introduction mettant en scène notre héros national "Zizou Christ" porteur de flamme bloqué dans les transports parisiens relayé ensuite par un individu encapuchonné faisant très certainement référence à Assassin's Creed, individu qu'on suivra dans ses pérégrinations monumentales tout au long de la soirée - a donc débuté par le premier de ses 12 tableaux intitulé sobrement, comme il en sera des 11 autres, Enchanté. Et enchanté par quoi ? Par Lady Gaga en robe noir et pompons roses j'imagine. Une Lady Gaga et son "troc en plome" accompagnée de danseurs pastichant efficacement le music-hall parisien de Zizi Jeanmaire. Pas de doute on est dans un Paris caricatural. Mais un Paris qui dit déjà beaucoup de choses et qui annonce en vérité tout le reste. Ce n'est pas la caricature le problème - j'imagine bien que toutes les cérémonies dans ce genre sont en grande partie caricaturale. Le problème c'est ce qui est caricaturé. Et ce qui est caricaturé ici c'est Paris ville lumière, ville-monde du spectacle, de la musique et de la mode. Il nous fallait une star américaine parce que Paris c'est l'ouverture au monde. Paris est cette ville mondialisée qui a parfaitement conscience de ce que l'est et elle a décidé de le montrer et de le réaffirmer. L'ironie c'est qu'on verra bientôt comme me l'a fait remarquer un ami qui lira cette critique que nos stars françaises ont elles plutôt chanter en anglais...

Synchronicité

Alors que les premiers bateaux des délégations suivent leur cours - on constatera au passage avec pitié que certaines des plus maigres délégations ont droit à une barque quand les délégations monstres américaines et chinoises ont elles le droit à leur lourd bateau-mouche - un autre tableau se prépare... Voici venue Synchronicité ! Synchronicité qui traduit en spectacle la promesse d'Emmanuel Macron de rebâtir le toit de Notre-Dame avant l'ouverture des JO. Voici donc des danseurs suspendus aux échafaudages de Notre-Dame et rendant un vibrant hommage à tous ces artisans et ces petites mains qui ont fait un travail remarquable pour rendre à cette cathédrale son toit ! C'est l'occasion plus globalement de parler du monde de l'artisanat et du travail.

Cela dit on déplorera - sauf pour les actionnaires j'imagine - peut-être la longue pub faite à LVMH. Je note cela dit que c'est parfaitement raccord avec l'idée centrale de représenter Paris pour ce qu'elle est effectivement : une ville de la mode et du luxe. D'ailleurs ça m'a fait plutôt rire tous ces commentaires généralement de gauche qui ont vu dans cette cérémonie un grand plaidoyer inclusif et anticapitaliste ! Je pense qu'on n'a pas vu la même chose.

Liberté

Que ne serait pas la France sans la liberté ? Non pardon la Liberté. La majuscule est très importante. Comme la Révolution ou la République. Il faut toujours mettre des majuscules, déjà parce qu'il faut sacraliser des valeurs qu'on estime intouchables et puis surtout parce que sinon on ne sait pas vraiment de quoi on parle. Et la Liberté ici est effectivement associée à sa grande accoucheuse : la Révolution. Tout commence donc avec le pastiche romantique de La Liberté guidant le peuple, célèbre tableau d'Eugène Delacroix. Parce qu'il nous fallait Gavroche. Parce que Gavroche c'est nous. On est cet enfant qui réclame la Liberté dont il ne sait pas ce qu'elle implique, qui s'entiche de la violence révolutionnaire du moment et croit que celle-ci est une chose légère et sans conséquence. Et la transition est toute trouvée puisqu'on en arrive effectivement à l'une des images qui a fait le plus polémique : Marie-Antoinette décapitée récitant le Ça ira révolutionnaire. On dira que c'est de l'art, que ce n'est que du spectacle mais l'image en elle-même est d'une grande violence. Une tête coupée est difficilement bon enfant. Je n'exclus pas qu'on puisse en faire des bons détournements mais dans le cas présent on n'est pas dans une forme de dénonciation de cette violence révolutionnaire. Non, on la constate et on en joue admettant devant le monde entier que couper la tête de nos souverains c'est dans notre ADN, qu'on ne peut pas envisager la Révolution autrement.

Je ne me fie pas trop à ce que les auteurs peuvent dire après coup, non parce que je pense que leurs intentions ne comptent pas mais parce que je pense que ce genre de cérémonie en mondovision dépasse le cadre strict de l'art et du spectacle et que des considérations politiques et géopolitiques s'immiscent plus que d'habitude (on y reviendra) et je doute donc de leur parfaite sincérité. Mais je les ai écouté tout de même. Certains ont expliqué, dans leur grande légèreté que cette Marie-Antoinette décapitée c'était en fin de compte la réaction volontairement irrévérencieuse du traitement volontairement révérencieux qu'avaient réservé les organisateurs britanniques à leur souveraine lors de la cérémonie d'ouverture des JO de Londres 2012 (source : https://x.com/franceinter/status/1817087436364669240 ). En sorte quelque chose de bon enfant et qui réaffirme un caractère qu'on aime bien présenter de manière désopilante à l'étranger : celui d'un peuple qui n'a pas hésité à décapiter son souverain (oubliant ou ne connaissant pas au passage que les Anglais ont fait la même chose au 17e siècle).

Je suis assez perplexe devant ce genre d'attitude. Je ne suis pas sûr qu'il faille prendre la violence révolutionnaire à la légère. Ces mêmes organisateurs ont expliqué qu'ils voulaient évoquer la Révolution française - c'est déjà un choix qui est discutable : pourquoi faudrait-il obligatoirement évoquer la Révolution ? - et que le seul lieu idoine sur le tracé de la Seine pour le faire c'était la Conciergerie, prison pendant la Révolution où a effectivement séjourné Marie-Antoinette d'où aussi le choix de représenter cette reine. Je suis d'autant plus perplexe que parler de la Révolution aurait pu se faire à d'autres endroits et aurait pu être évoquée par des symboles qui respirent moins la violence (Champ-de-Mars en évocation de la Fête de la Fédération entre autres...).

Bref... Il y aurait beaucoup à dire sur cette célébration de la violence révolutionnaire. Passons cela, j'avoue que la performance de Gojira sur la Conciergerie m'a plu. C'était diablement efficace et spectaculaire !

Ce tableau de la Liberté s'est poursuivi ensuite par une ode à l'amour libre, au libertinage avec des références à Marivaux, à Verlaine, à Musset, à Leïla Slimani (j'imagine que c'est de l'auto-publicité puisque la dame faisait partie des maîtres et maîtresses de cérémonie, comme par hasard), et j'en passe. Je n'ai rien contre les amours libres, aimez-vous donc ! Vous ne ferez jamais rien de mieux ! N'oublions pas les mots de notre cher Président : il faut réarmer démographiquement la France ! Mais ne me faites pas croire amis de gauche que ce ménage à trois est une référence à Marivaux ou à Racine. Un triangle amoureux n'est pas un trouple. J'en ai même vu un qui m'expliquait que c'était une référence à Jules et Jim. J'aime beaucoup le film mais il ne me semble pas avoir vu Jules coucher avec Jim ou alors c'est une scène coupée.

Cela étant dit, tout cela est magnifiquement exécuté. Passons donc à la suite !

Égalité

Il y a eu Batman contre Superman, Alien vs Predator, Godzilla contre King Kong, Rocky contre Mister T, Mitterrand et Balladur, mais alors ce feat rentre aisément dans le panthéon des rencontres et crossovers incroyables et improbables. Oui je parle bien du feat que nous ont proposé Aya Nakamura et la Garde républicaine. Une rencontre avec beaucoup de symboles pour celui qui avait l'oreille et l'oeil attentifs. Aya Nakamura qui s'éloigne de l'Académie française, qui reprend For me formidable d'Aznavour (rappelez-vous les étrangers chantent français, les Français chantent anglais), une chanteuse dont on explique régulièrement qu'on ne comprend jamais rien à ses paroles. Il n'y a strictement rien d'anodin bien évidemment. C'est la langue française dans tout ce qu'elle a de plus rigide qui en prend un coup. Par bonheur pour lui, Bernard Pivot n'est plus.

J'avoue que moi ça ne me parle pas, effectivement je fais partie de ces gens qui ne comprennent pas Aya Nakumura (ni son succès, ni ce qu'elle chante) mais j'admets volontiers que c'est peut-être le seul tableau un tant soit peu populaire, parce que la chanteuse l'est, parce qu'on fait un pied de nez à ces sages de l'Académie française qui nous disent comment on doit parler et comment on doit écrire.

Fraternité

La devise ne serait pas complète sans la Fraternité bien évidemment. Pas grand chose à dire de très intéressant parce qu'en vérité on a fait qu'enchaîner les citations et les références. Le Petit Prince, Georges Méliès, Maurice Ravel... Tout cela est très charmant. Plus surprenant est l'apparition soudaine et rigolote des Minions. L'occasion de nous rappeler pour nous Français qu'on n'est pas des billes en animation à côté des ogres japonais et américains.

Tout aussi convenue et attendue était la Marseillaise interprétée par Axelle Saint-Cirel.

Sororité

Et je me demande si ce tableau n'était pas aussi convenu. Oui, il fallait laisser la place aux femmes qui ont été si longtemps méprisées et oubliées ! Ça fait 20 ans qu'on nous le dit, on commence à le savoir. On leur a donc laissé cette place parce que la justice doit être cérémonielle ! Mais on ne leur a peut-être pas laissé cette place de la plus belle des manières.

Déjà que je ne suis pas un grand fan du Panthéon - j'ai en horreur l'idée de se prosterner devant des figures du passé, figures qui sont bien souvent manipulées par les hommes du présent, mais alors avoir transformé la Seine en Panthéon, c'est le pompon. On a enchaîné les statues en résine couleur dorée (v'là l'hommage). Simone Veil, Christine de Pizan, Gisèle Halimi, Alice Guy, Olympe de Gouges, Louise Michel et d'autres se sont donc enchaînées dans une certaine solennité. On s'interrogera de la cohérence qui permet d'associer Louise Michel avec Olympe de Gouges mais cette cohérence là nos maîtres de cérémonies s'en fichent. Ce qui compte c'est de représenter des femmes notables sans savoir ce qu'elles ont forcément de notables pour en fin de compte enchaîner les figures les plus convenues d'un féminisme mondain typiquement parisien et académique. Olympe de Gouges par exemple, ça fait 20 ans qu'elle est dans les manuels scolaires (elle y était déjà quand j'étais au collège), ça n'a rien d'original. Ce n'est pas faute d'avoir un réservoir de figures féminines révolutionnaires conséquent (Pauline Léon, Théroigne de Méricourt, Madame Roland, Madame de Staël...). La Révolution française est une période qui a bien des égards à fait une large place aux femmes. Simplement on n'en parle pas assez parce que quand on parle des femmes de la Révolution française c'est toujours la même qui revient. Olympe de Gouges est aux femmes révolutionnaires ce qu'est Robespierre aux hommes révolutionnaires, des individus peu intéressants dont le poids cache la richesse de leurs contemporains.

Bref, je ne vais pas plus loin sur Olympe de Gouges mais je remarque aussi que les femmes qu'on nous a présentées ont pour certaines ce dénominateur commun qui est Paris. Des femmes de lettres au Moyen Âge ce n'est pas ce qui manque non plus, pourtant c'est Christine de Pizan qui a eu ce privilège. Et Christine de Pizan, à son époque, au tournant du 14/15e siècle, c'est une lettrée qui rejoint la cour du roi à Paris, qui écrit dans la langue de Paris, qui est effectivement le français. Mais à l'époque en France, il y autant de langues et de dialectes qu'il n'y a de fromages. En vérité avec Christine de Pizan, c'est Paris et son impérialisme qu'on célèbre. A titre de comparaison on aurait pu célébrer Aliénor d'Aquitaine qui a eu un rôle artistique important au XIIe siècle dans l'édification de l'amour courtois et de la poésie occitane, mais non... Ce qu'on présente reflète toujours, par nos absences, nos impensés et l'impensé ici est la France concrète, la France des territoires...

Sportivité

Tu m'étonnes... Il fallait bien à un moment qu'on parle de sport merde ! A mon humble avis c'est là où la pluie a causé quelques renoncements. Parce que finalement ce tableau est largement oubliable. Les performances de breakdance et de BMX étaient timides, on comprend pourquoi bien évidemment. Dommage...

Festivité

Là on entre dans le dur si j'en juge par le torrent de réactions. Paris est une fête mais Paris ne vaut peut-être plus une messe si on en juge par la réaction des catholiques. Parodie de la Cène ou non, à titre personnel, je trouve qu'on en fait trop. Le problème n'est pas tant dans le supposé blasphème commis. Bien évidemment je dis ça en étant athée donc ça ne me touche pas, je préfère le préciser - encore que je tiens à souligner que le problème du blasphème n'est qu'un problème de croyant, et puis l'esprit français c'est aussi la satire, où est donc votre esprit Charlie ? Non, disons que le principal problème de la séquence c'est qu'encore une fois c'est le Paris de la mode, le Paris des amours libres qu'on célèbre. Oui c'est très bien que ça soit inclusif, il y a des petits, il y a des gros, il y a des blancs, il y a des noirs, c'est génial mais ça, ça ne parle qu'à Paris. C'est le problème des Parisiens. La mode, le luxe, les défilés de grand couturier ce n'est pas le monde du Français de la province. Mais faisons donc rayonner ce qui rayonne déjà dans le monde...

Alors ils ont quand même essayé de parler un peu de la France hors de Paris par l'arrivée de danseurs auvergnats. Je vous avoue avoir souri parce qu'au fond cette France folklorique me semble être une France encore une fois typiquement parisienne. Pourquoi des Auvergnats ? Parce qu'historiquement des Auvergnats ont émigré à Paris, ils ont littéralement construit Paris au 19e siècle et ils ont importé leur folklore. Après tout c'est sans doute une coïncidence. Je vois peut-être le mal partout (suis-je complotiste ?! malheur...).

Il n'empêche qu'on est vite retourné dans la France de Paris, parce que cette Festivité c'était aussi bien évidemment l'occasion de rendre hommage à la French touch et à la scène techno parisienne des années 90 (sans Daft Punk ça fait tout de même tache). La culture rave a trouvé l'espace de quelques minutes une dernière extase.

Ce tableau a aussi été l'occasion de faire passer un message à quelqu'un en particulier. Tous ces bons sentiments d'inclusivité, de tolérance, d'union, de paix même, vous croyez que ça correspond à ce qu'Emmanuel Macron a pu exprimer jusque-là en 7 ans d'exercice du pouvoir ? Je n'y crois pas en tout cas, par contre je crois que laisser s'exprimer ces bons sentiments ça permet de créer du contraste avec la Russie de Poutine surtout quand on affiche ostensiblement le drapeau européen sur la tour Eiffel... Les JO ont toujours été géopolitiques, ces olympiades n'échappent pas à la règle.

Obscurité

Juliette Armanet qui reprend Imagine de John Lennon, je vous refais le dessin des artistes étrangers qui chantent français et des artistes français qui chantent anglais ou c'est bon vous l'avez ?

Oui c'est joli, c'est touchant, Juliette a une belle voix mais il n'y avait pas assez de chansons dans le répertoire français qui auraient pu traduire les mêmes bon sentiments ? Il fallait vraiment reprendre John Lennon ? Tu ne le fais pas, tu meurs ?

Solidarité

Une cavalière qui surgit du fond de la nuit, cours sur la Seine au galop. Vous n'aurez pas meilleure description. Cette cavalière (de l'apocalypse selon nos catholiques qui ont été tendus tout au long de la soirée) c'était sympa tout de même. J'aime bien le concept. Voilà. On passe à la suite ?

(ah si au fait, entre temps ces cons de gendarmes ont monté le drapeau à l'envers, ça c'est ma France !)

Solennité

Estanguet a fait son discours.

Un type du CIO dont je ne connais pas le nom et dont je n'en ai strictement rien à faire a fait son discours.

Macron a fait son discours.

Bref, tout ce que j'ai appris c'est que Solennité c'est synonyme de sommeil.

Nonobstant ils m'ont surpris par l'absence d'Anne Hidalgo (ou alors peut-être étais-je endormi). A-t-elle trépassé des suites de sa baignade dans la Seine ? On ne sait pas.

Éternité

Vous voyez ces films où l'on se dit "le film est bof mais quand même la fin déchire", ici c'est pareil. Ils ont tout donné pour le bouquet final et c'était énorme. "Zizou Christ" est revenu, il a passé le flambeau à Nadal, la Tour Eiffel s'est illuminée on aurait dit un concert de Jean-Michel Jarre, Teddy Riner et Marie-Jo Pérec ont allumé la vasque. Et quelle vasque les amis ! C'est une montgolfière ! C'est le symbole du Paris des Lumières. J'aimerais beaucoup la voir de mes yeux. Les Parisiens ont beaucoup de chance.

Mais ce n'est pas tout...

On a eu CELINE !!!

Elle est revenue ! Et elle n'est pas revenue dans une salle de merde d'un casino à Las Vegas. Non ! Elle est revenue sur le premier étage de la tour Eiffel. Et elle a chanté du Piaf ! Alors je ne sais pas si c'est du playback, certains le disent mais même quand bien même c'est du playback, quelle voix ! Bien sûr personne n'est étonné mais je crois que rappeler qu'elle est malade n'est pas inutile.

Bref, c'était fou. Est-ce que ça permet cependant d'oublier tout ce qu'on a vu précédemment ? J'aimerais bien en tout cas mais malheureusement je n'oublie pas ce qui a été célébré, ce qui a été honoré, ce qui a été fêté... On a voulu voir Paris et on a vu Paris...

Conclusion d'une ouverture

Finalement, peut-on simplement reprocher à cette cérémonie d'ouverture des JO de Paris 2024 d'avoir célébré Paris ? Bien sûr que non, c'était même attendu. Dans un pays si centralisé, croyez-vous donc qu'on allait parler de la vilaine "province" ? Non, parce que la France c'est Paris, parce que Paris c'est la France. C'est entendu pour le monde entier, pour les Parisiens et même pour les Français de cette vilaine province qui ont oublié depuis le temps qu'ils ont été acculturés à Paris, que la langue qu'ils parlent est la langue de Paris. La France c'est définitivement Paris ! Le reste n'existe pas, ou s'il existe il ne peut l'être que par la médiation de Paris. On n'efface pas 800 ans d'histoire de conquête francilienne et de centralisation d'un revers de main.

En vérité, c'eût été bien étonnant si on avait fait comme les Chinois en 2008, à savoir représenter l'ensemble des ethnies et cultures qui composent ce pays, ou comme les Britanniques en 2012 qui ont introduit leur cérémonie par l'image bucolique - peut-être naïve certes, mais quelle cérémonie n'est pas mièvre, naïve ou fantasmée ? Est-ce qu'on a échappé seulement à cette règle ? - de la campagne anglaise... Sans doute dans les deux cas, trop rance pour les maîtres de cérémonie. Mais qu'on ne me fasse pas croire que le récit qui a été proposé est le plus idoine ou le plus représentatif de la France actuelle. Représentatif de Paris, oui ça j'en conviens parfaitement. Mais le lien qu'on faisait habituellement entre Paris et la France, pour ceux tout du moins qui habitent cette vilaine province, semble aujourd'hui et plus que jamais ténue. La France périphérique a définitivement brillé par son absence...

Tout cela étant dit, il faut reconnaître que tout cela a été parfaitement exécuté. En cela, la scénographie est excellente. Je dénonce le récit mais ce qui a été raconté a été techniquement bien raconté et cela avec toutes les contraintes environnementales. On a beaucoup insisté le jour même sur la météo capricieuse mais faut aussi reconnaître que ce n'est pas une entreprise évidente de faire un spectacle le long d'un fleuve dans une ville pareille. Il y a du travail, ça se ressent et tout cela est parfaitement réalisé. Aussi, on retiendra les belles images, on retiendra à ce titre sans doute et pendant très longtemps la performance de Céline Dion. Du moins j'en garderai personnellement le souvenir d'un moment unique de grâce pour celle que la maladie a écarté de la scène depuis un bout de temps maintenant. Pour ces quelques fulgurances notamment, on n'oublie pas facilement une cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques quand bien même celle-ci serait mauvaise. La Tour Eiffel a brillé sur le monde au propre comme au figuré. Mais faut-il modestement se réjouir de ces belles images et faire fi du reste ? Je suis de nature à voir le verre à moitié vide et constater que même les plus beaux tableaux servent en fin de compte à construire un récit dont je déplore les ressorts et les intentions. Chacun se fera juge...

Roussix
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le 28 juil. 2024

Modifiée

le 28 juil. 2024

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