Enchaîner ces deux chiasses que sont Deux moi et Chambre 212 n'était peut-être pas la meilleure des idées. Car pour autant que ces œuvres se répondent sur certains points, leur façon d'aborder la dépression et le temps qui passe se démarque drastiquement dans leur approche. L'une étant beaucoup trop formelle et l'autre se voulant plus légère malgré la "gravité" du sujet abordé. Mauvaise idée disais-je car au départ très emballé à l'idée d'assister à des œuvres personnelles et d'un traitement potentiellement naturaliste, me voilà face, d'un côté à un film ne sachant jamais quel ton donner aux séquences qui parsèment le bousin (d'une scène à l'autre un personnage passe d'un idiot fini à une figure d'une perspicacité inouïe) de l'autre à une interminable pièce de théâtre mal assumée. Bref, la colère m’envahit coup sur coup, c'en est trop.
L'avantage de Deux moi, quelque part, c'est qu'on s'y emmerde un peu moins. Mais revenons sur Chambre 212. Le petit Chrichri s'est dit que la bonne idée de son film serait de retranscrire l'ennui d'une femme (Chiara Mastroianni PRIX D'INTERPRETATION A CANNES, c'est écrit au début très fort, comme ça on frétille) pour son homme en lui faisant croiser certains personnages de sa vie de jeunesse, le tout depuis une chambre d’hôtel à la vue plongeante sur le domicile conjugal. En soit pourquoi pas, surtout que cette proposition de mise en scène Hitchcockienne/Depalamaienne/Finchienne/Mon Cul sur ta Hyène aurait pu se prêter à toutes les situations voyeuristes du monde.
Hélas, le tout platement exécuté, se révèle indigent à souhait. Sulfureux pour ta grand-mère et interprété avec un je-m’en-foutisme absolu, au point que tous les acteurs ne semblent pas jouer dans le même film. Enfin si, Vincent Lacoste il joue dans le même film que ses autres films son éternel rôle d'ado rien à foutre. Au moins cette fois on voit son cul. Mastroianni passe son temps à écarquiller les yeux en jouant une fausse candide obligée de se confronter à son moi jeune, et quand on comprend ce que dit Biolay c'est déjà pas mal.
Comme je le disais plus haut, le film se veut réflexif et sulfureux. Hum hum. Évidemment le huit clos est l'endroit parfait pour ce genre d'exercice, car l'avantage de tourner en studio c'est de pouvoir y glisser sa caméra partout, de créer une double interprétation, bref, d'utiliser le langage cinématographique. Vous me direz, le parti pris ici est plus de moins de simuler une pièce de théâtre, mais le problème c'est qu'à aucun moment les personnages ne semblent prisonniers du décor dans lequel ils sont pourtant enfermés. L'idée de base aurait pu, aurait du, être menée jusqu'au bout, se terminer en orgie des corps et des sentiments, ce qu'une des séquences laisse espérer à un moment. Au lieu de cela on se contente de surplace, de réflexion à trois francs sur ce que c'est de vieillir, sur ce que c'est le couple après vingt ans de vie commune, on attend quel personnage va débarquer pour tenter un effet comique (mon Dieu le passage avec la mère, mon Dieu le passage avec Aznavour/DSK tout droit sorti des guignols).
Il faut dire que la subtilité n'est pas le maître mot de ce Chambre 212 puisque sous couvert de basculer dans l'absurde au bout de dix minutes de film il se permet de tout expliciter à la tronche du spectateur. Rien ne vous sera épargné et chaque ligne de dialogue, plus surexplicative que la précédente sera accompagnée de son petit cadre plan-plan, fait de champs-contrechamps à la lumière très rouge dans lesquels absolument aucune audace ni piste de réflexion supplémentaire n'auront lieu. Rien ne va, aucun effet de mise en scène, un montage sans aucune grille de lecture ni audace, un cadrage et une lumière d'une scolarité inouïe, c'est chiant comme la pluie.
Et comme on ne nous épargne rien, le film ne tient même pas son concept car la fin vient nous expliquer en pleine poire que, oui, nous avons bien assisté à quelque chose d'absurde, d'irréel, s'étant déroulé dans l'inconscient des deux personnages, des fois qu'on serait passé à côté. Cette œuvre masturbatoire avec ses thématiques pénibles dont on se contrefout est un calvaire sans aucune audace, un objet qui a dix ans de retard dans son traitement, aussi réflexif qu'une séance chez ta petite sœur étudiante en psychologie. Cassez-vous avez vos thématiques de merde de bobo parisiens (coucou je te vois Klapischou avec ton vilain caméo mais on reviendra vers toi plus tard).
Au moins dans Ma Mère, Isabelle Huppert met son doigt dans le cul de Louis Garrel.