Charade, c’est la nonchalance à son apogée. Un polar qui se met à l’unisson de ses personnages, abordant l’intrigue avec autant d’enthousiasme que de flegme, au point qu’on ne sait pas qui du personnage ou du comédien se fait plaisir.
Le pistolet en plastique qui ouvre le film sur Audrey Hepburn annonce clairement la couleur : les fausses pistes vont se multiplier, et l’intrigue retorse va clairement accumuler les cadavres, mais en pyjama, multiplier les courses folles dans le métro et visiter un Paris infesté d’espions à tous les recoins.
Sur un ton très screwball, Charade suit aussi la constitution d’un couple irrésistible, celui de la sémillante Hepburn et du ténor Cary Grant, qui n’a pas besoin de jouer plus que d’habitude vu qu’il change d’identité tous les quarts d’heure, occasionnant une nouvelle première fois à la femme qui le convoite. Les dialogues sont percutants, et l’alchimie entre le vieux beau masquant sa raideur sous un charme ineffable et la jeune trentenaire bondissant avec grâce sur tous les twists est d’une efficacité redoutable.
L’hommage à Hitchcock, que ce soit Vertigo pour le combat sur le toit ou Psychose pour la douche, est constant, et participe de cet état d’esprit général : tout le monde a conscience d’être une référence cinématographique, et joue de ce statut pour nous inviter à une soirée décontractée. La facilité déconcertante avec laquelle tout cela fonctionne fait partie de ce talent propre aux américains, y compris sur nos terres…