Un vagabond voulant se faire un peu d’argent se présente pour servir de partenaire à un champion de boxe qui s’entraîne. Grâce à un procédé malhonnête le vagabond met le champion KO et se trouve alors embarqué dans le monde de la boxe et soumis aux entraînements. Les nombreux accessoires sont autant d’occasions pour Chaplin de déployer le champ de sa gestuelle et il s’en donne ici à cœur joie !
Après l’entraînement, vient enfin le jour du combat, une séquence qui prend son temps et qui est le sommet du court-métrage. Ce combat est mené sans respect d’aucune règle, c’est un véritable chaos. C’est la première séquence, depuis qu’il est acteur, dans laquelle Chaplin peut être pleinement lui-même. Le combat est un champ de bataille, mais il est soigneusement chorégraphié. Après des dizaines de court-métrage dans lesquels il était prisonnier de cadres rigides, Chaplin est enfin né !
The Champion nous offre également plusieurs virages à cloche pied et à angle droit qui sont l’une des marques de fabrique de Chaplin. C’est au cours de ses années de cirque et de music hall qu’il les avait appris et peaufinés.
Il est possible que Chaplin ait puisé l’idée de ce scénario dans sa propre expérience car il eut l’occasion de se battre avec un vrai boxeur dans sa jeunesse ! Après s’être accroché avec Chaplin lors d’une soirée, Ernie Stone, ancien boxeur professionnel poids léger, lui donne rendez-vous pour se battre dans sa chambre d’hôtel :
Sans échanger un mot, nous nous mîmes torse nu, puis nous nous plantâmes l’un devant l’autre. Nous frappâmes et esquivâmes pendant ce qui me parut un temps interminable. A plusieurs reprises, il me frappa droit au menton, mais cela ne me fit aucun effet.
— Je croyais que tu avais du punch, ricanai-je.
Il plongea vers moi, me manqua et alla se cogner la tête contre le mur, ce qui le mit presque knock-out. J’essayai de l’achever, mais mes coups étaient mous. Je pouvais le frapper sans risque de riposte, mais je n’avais plus de force dans les poings. Je reçus soudain un coup en plein sur la bouche, qui m’ébranla la mâchoire, et qui me dégrisa aussitôt.
— Ça suffit, dis-je. Je ne tiens pas à perdre mes dents.
Il s’approcha et m’étreignit, puis regarda dans la glace : je lui avais tailladé le visage. J’avais les mains gonflées comme des gants de boxe, et il y avait du sang au plafond, sur les rideaux et sur les murs. Je ne sais absolument pas comment nous en avions mis ainsi partout. (…) jamais je ne me suis battu depuis lors. (autobiographie de Chaplin)
Heureusement pour nous, il s’est de nouveau battu mais cette fois-ci devant les caméras et sans aucun doute ce souvenir lui restait en tête !
Cette séquence de boxe célèbre a fait l’objet d’un remake dans Les lumières de la ville assortie de nouveaux gags.
https://www.youtube.com/watch?v=hYyDBgj9yzY