Comme personne n'avait écrit de critiques sur ce film, j'ai consulté IMDB pour connaître l'avis des spectateurs de ce court qui m'a réjout au plus au point. Tout le monde s'accorde à dire qu'il s'agit-là d'un film très moyen dans la carrière de Chaplin, et qu'il est handicapé par une violence gratuite à la limite de la vulgarité. En effet, on y voit Charlot passer une bonne partie de son temps à frapper son collègue de travail, un vieil homme au bout du rouleau qui aurait plutôt sa place dans un hospice que dans les coulisses d'un théâtre, et ce par pur plaisir semble-t-il. La belle affaire...
La "violence", la méchanceté gratuite ont toujours fait partie de l'univers du slapstick. On peut même dire que c'est l'un de ses piliers fondateurs. Dans ce qui est ici sa première réalisation d'un 2 bobines, Charlot la pousse presque dans ses derniers retranchements. Par exemple, il n'hésite pas à frapper au visage le vieux bonhomme alors que celui-ci se retrouvé coincé sous une énorme malle. Pour s'en offusquer, il faut vraiment n'avoir jamais vus de films burlesques...
Mais The Property Man n'est pas qu'un défouloir bête et méchant. En fouillant bien (enfin, pas tant que ça, car c'est assez évident), on lui trouve même une certaine profondeur : le film se paye ouvertement la tronche des mauvais artistes de théâtre/cabaret, des cabotineurs de scène, ou des acteurs à l'égo surdimensionné. Chaplin fait preuve d'un regard très acide sur "les professionnels de la profession", et affirme par là-même sa conception de l'art de la pantomime, en se différenciant des autres clowns gesticulants. Qui plus est, on y trouve également l'embryon d'un des runnings gags du Cirque : involontairement, Charlot est amené sur le devant de la scène et décroche les rires du public en provoquant des catastrophes. Et, à la toute fin, c'est même le public qui en prend pour son grade et qui devient l'arroseur arrosé de cette farce.
Pour toutes ces raisons, Property Man est tout sauf un film mineur puisqu'il précise la vision d'un artiste sur son métier, son art, et qu'il pose les fondations d’œuvres à venir...