Dog et Mirales sont deux potes d’enfance qui tournent en rond dans leur village d’Occitanie. Le premier est taiseux, le second verbeux. Très verbeux. Tant et si bien qu’il déblatère à tout va, souvent pour ne rien dire, souvent au détriment des gens qui l'entourent, toujours avec une gouaille et un phrasé délectable. Leur relation n’est pas d’égal à égal, Mirales s’imposant comme le meneur qui promène son chien docile partout où il va. Mais il l’aime ce chien, comme il aime les habitants qu’il croise dans ses errements. Il a un grand cœur, mais il est fragilisé par une situation familiale compliquée, par une absence d’objectifs concrets dépassant le fantasme (sur son travail, sur la femme qu’il épousera…). Il trouve comme ancre et comme refuge la littérature, qu’il intègre à sa locution permanente. Mais lorsque débarque Elsa, que l’on découvrira plus loin, étudiante en littérature comparée, qui s’entiche de Dog, c’est le tumulte entre les deux adulescents.
L’histoire de Chien de la casse est simple, mais elle est d’une efficacité redoutable pour brosser le portrait de personnages complexes et touchants, d’une partie de la société rurale souvent occultée au cinéma. Des personnages campés avec maestria, Mirales en tête avec un Raphaël Quenard qui a explosé en 2023 et qui fait montre d’un talent hors pair dans sa génération. Une caméra discrète mais efficace pour saisir des instants de vie précieux et erratiques. Et surtout une écriture au cordeau, où s'enchaînent des dialogues plus percutants les uns que les autres dans un melting pot de citations, de mots fleuris, d’élucubrations farfelues, et de langage de cassos.
Une oeuvre redoutablement émouvante où la simplicité narrative laisse place à la poésie. Tout ça dans un premier film, chapeau!