Après le succès critique et populaire du film Les Griffes de la Nuit on pouvait croire que Wes Craven allait prendre un virage décisif dans sa carrière et abandonner les productions un peu fauchées type The Hill have Eyes 2 ou L'été de la Peur. Pourtant le réalisateur fera une nouvelle fois un choix pas très judicieux, discutable et bizarre en enchainant avec un petit téléfilm fauché distribué directement en vidéo. Un film avec une bonne petite histoire mais une réalisation et un aspect technique qui ne dépasse jamais le cadre du thriller pépère pour mémères et du petit écran.
Chiller (Terreur Froide) c'est l'histoire d'un type cryogénisé depuis plus de dix ans mais dont le cylindre de congélation se dérègle mystérieusement. Les chirurgiens tentent alors d'opérer le corps inerte avec les progrès scientifiques actuels et de le réanimer pour faire plaisir à sa pauvre mère. Opération réussie sauf que le beau ténébreux semble avoir perdu un peu de saveur et gagné pas mal en méchanceté en passant au micro onde en position décongélation.
Chiller s'appuie sur une histoire un peu bancal pour s'interroger sur la dualité entre le corps pouvant être guéri par la science et l'âme ayant besoin de spiritualité métaphysique. Ce type revenu d'entre les morts semble avoir perdu quelque chose en cours de route et devient un homme d'affaire froid, cynique, arrogant, implacable, pragmatique et meurtrier dans une caricature assez jouissive d'une mutation vers un monde capitaliste sans états d'âme. A l'opposé on trouve un prêtre interprété par Paul Sorvino qui s'interroge sur la survie de l'âme par moins 196°C surtout lorsque le corps revient à ses fonctions après dix ans de coma. De par cette dualité et le choix de faire de ce revenant un homme d'affaire qui use et abuse de son pouvoirs y compris tel un prédateur auprès des femmes qu'il croise le script donnait vraiment matière à un film intéressant. Malheureusement à l'étroit dans son format télévisuel, coincé dans ces restrictions plutôt grand public pour sa noirceur et paresseusement mis en scène par un Wes Craven visiblement bien peu impliqué Chiller manque de force, de profondeur et de relief. Il reste un téléfilm un peu mou et pas spécialement captivant dans lequel objectivement il ne se passe pas grand chose de palpitant même si Michael Beck (The Warriors) est charismatique et inquiétant en monstre ordinaire et désincarné.
Petit film méconnu de Wes Craven Chiller ressemble un peu à son personnage, un truc oublié au fond d'un congélateur qu'on passe vite fait au micro onde mais dont les saveurs semblent avoir définitivement disparues avec le temps.