J’ai une admiration sans faille pour Daniel Mermet depuis une quinzaine d’années, époque ou ma chère et tendre m’a sorti les oreilles d’R.T.L. pour me vanter les mérites de France Inter et d’une émission phare : Là-bas si j’y suis. C’était une belle époque, de programmes exigeants mais grand public, une époque où France Inter savait encore se sortir les yeux des résultats médiamétrie. Daniel Mermet a été une révélation, un homme qui, certes, défend avec acharnement des idées vraiment de gauche, qui aborde des thèmes qui parfois secouent le prunier un peu fort, mais qui le fait toujours de manière honnête, toujours sourcée et argumentée, en respectant systématiquement ceux qui ne partagent pas ses points de vue, alors qu’ils sont parfois tellement violents avec lui.
Chomsky Et Cie constitue la version filmée d’une série d’entretiens (diffusés sur France Inter en 2007) avec le grand philosophe contemporain Noam Chomsky, philosophe contesté car avançant des points de vue assez radicaux, mais toujours lucides, sur le rôle des U.S.A. et de ses partenaires dans la marche du monde qui, aujourd’hui, se veut fondée uniquement sur des rapports dominé/dominant. Ces entretiens, qui se font parfois avec des amis de Chomsky, passent en revue la collusion qui existe entre les grandes entreprises internationales, le monde politique et celui des médias, le tout dans la défense d’une idéologie unique et au service exclusif de ces derniers.
Chomsky aborde également ce en quoi il croit le plus, une liberté d’expression absolue comme elle existe aux U.S.A. Il revient sur le malentendu énorme qui eu lieu lorsqu’il préfaça bien malgré lui un livre de Faurisson et qui l’opposa à fleuret moucheté à Vidal-Naquet. On comprend bien le cheminement du philosophe, qui refusa de donner un point de vue sur le livre du négationniste. Seul pour lui comptait le fait qu’il puisse exprimer librement sa pensée. D’où la réflexion sur les lois mémorielles, Vidal-Naquet se prononçant lui-même contre ce principe.
Daniel Mermet, toujours disposé à cultiver notre curiosité, nous donne accès à la pensée d’un bel esprit, de ces esprits tels celui d’Albert Jacquard, ces intellectuels qui n’ont pas oublié qu’à une époque leurs semblables étaient avant tout des humanistes. Chomsky, comme Jacquard, rend sa pensée accessible en évitant de manipuler des concepts trop complexes et surtout, en la faisant résonner avec notre époque. Ses raisonnements, ses cheminements intellectuels sont imparables, pour peu qu’on ne ferme pas ses oreilles en voyant en lui, comme le font B.H.L. et Finkielkraut, ni plus ni moins qu’un antisémite. Il reste le bonheur de voir pour une fois la liberté d'expression, dans des temps comme les nôtres, n'être pas utiliser que comme un leitmotiv par de pseudo-intellectuels qui viennent, en son nom, dissimuler le vide de leurs esprits étriqués derrière des formules outrancières et outrageantes.
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