Petit théâtre.
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le 4 nov. 2015
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Il est surprenant de découvrir cette œuvre de Jean Renoir, tourné un an après « La chienne » et la même année que « Boudu sauvé des eaux ». Surprenant car à part quelques signes distinctifs, on ne reconnaît en rien ce qui a fait et fera la saveur de ses films, « Chotard et Cie » se révélant assez mauvais.
Il s’agit de l’adaptation d’une pièce de théâtre « boulevardienne » poussiéreuse comme il en existait légion à l’époque, et Renoir ne sort jamais de ce cadre, allant jusqu’à figurer le baissé de rideau, par celui du magasin du fameux Chotard. Cette théâtralité se ressent jusque dans les décors (typiquement des studios de Joinville), dans les dialogues poussifs, mais aussi dans le jeu maniéré à l’extrême des acteurs aussi bien au niveau du phrasé que de la gestuelle. Notamment Charpin qui en fait des tonnes et semble pasticher Raimu continuellement. Le seul personnage un peu « moderne » est celui de François (l’écrivain au Goncourt) dégingandé, et blanc comme le mime, sa gestuelle acrobatique fait penser à celle d’un Danny Kaye.
Il s’agit là vraisemblablement d’un film de commande à petit budget, dans lequel Renoir s’est senti un peu à l’étroit. A l’étroit certes, mais qui lui a sans doute été utile pour se faire la main. Car tout l’intérêt de ce « Chotard et Cie » ne réside que dans les transitions de scènes. Le réalisateur y amène un peu d’originalité. D’un gros plan sur une affiche publicitaire, la caméra glisse vers un comptable de la boutique en pleine concentration, une ouverture de scène qui se fait sur une roseraie où une main coupe des fleurs qui serviront à la suite à faire la gerbe de mariage, la pré-annonce du Goncourt commence sur un bouddha indien baigné d’un halo scintillant, les entrées ou pointages à l’usine en arrière plan… Toute une sophistication symbolique (que d’aucuns trouveront superflue) compensant un scénario qui ne laisse aucune latitude créative.
Si l’on ajoute à cela une série de travellings s’enchainant au début, une certaine recherche au niveau lumière, quelques effets de style, Renoir ici brouillonne ses œuvres futures.
Autre bizarrerie, intentionnelle ou pas, la figuration patriotique. Un cirque passe dans la rue, les roulottes sont ornées tout en drapeaux tricolores tel un char du 14 juillet, un plan s’arrête sur un diplôme de combattant 14/18, des soldats en manœuvre. Message subliminal vers le public pour souligner le probable retour d’un conflit en Europe ? Nous sommes en 1932…
Bref, ce « Chotard et Cie » apparaît comme un mélange des genres, au goût douteux et bien peu passionnant.
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le 28 sept. 2015
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