Citizenfour
7.5
Citizenfour

Documentaire de Laura Poitras (2014)

Laura Poitras, documentariste, termine sa trilogie sur l’Amérique post 11 septembre en nous immergeant dans l’un des plus grands scandales étatsuniens du 21ème. En 2013, Edward Snowden, ex informaticien employé par l’Agence Nationale de Sécurité américaine décide de rendre public les programmes de surveillance déployés par la NSA pour capter et enregistrer les conversations téléphoniques des citoyens américains. Le documentaire nous transporte pendant plus d’une heure dans la chambre d’hôtel d’Edward Snowden à Hong Kong, où, déterminé, il a convié Glen Greenwald, Ewen MacAskill et L.Poitras afin de leurs révéler ses informations, étayées par des documents dérobés à son employeur. Depuis la chambre de l’hôtel la tension et la paranoïa sont palpables alors que Snowden et les journalistes élaborent peu à peu leur stratégie de révélation de l’affaire d’abord dans The Guardian puis dans The Washington Post. Une fois les premières lignes parues, il ne faudra que peu de temps pour que l’auteur des fuites soit découvert et que Snowden, en danger d’arrestation, divulgue publiquement son identité et les raisons de son action. Commence alors la deuxième phase du reportage oscillant entre le processus d’extradition de Snowden avec l’aide des Nations Unies et la poursuite du travail d’investigation mené par les journalistes aux USA comme à l’étranger (Brésil, Angleterre, Allemagne, etc). L’enquête est difficile est sous haute tension pour les journalistes qui prennent le risque de vexer au plus haut des instances gouvernementales mondiales tandis que la NSA nie toute implication dans l’écoute et la surveillance massive de tous ses citoyens. Ce film, qui vaudra à L.Poitras l’Oscar du meilleur documentaire, donne à voir, au plus près des protagonistes de l’affaire, la difficulté et la dangerosité de la missions que se sont donnés Snowden et les journalistes. Surtout, il soulève de grandes interrogations autour de possibles mensonges d’Etats, d’une limitation de la liberté fondamentale à l’expression libre et de la nécessité du journalisme d’investigation à l’heure d’une hermétisation et d’un manque de transparence autour des sujets de surveillance des citoyens.


L’aspect édifiant de ce documentaire est indéniable. Cependant, un sentiment d’ambivalence nous envahit tout le long quant aux finalités à donner à la mise à scène.
Contrairement au film « Snowden », on note une vocation informative et la construction d’un effet de réel. Le documentaire cherche à éviter la scénarisation à outrance. Conformément à la requête d’Edward Snowden, il relate davantage l’affaire en elle même que le personnage, ses motivations et son histoire. Il cherche à montrer un Snowden ni dramatisé, ni idéalisé ; seulement un homme porté par une conviction profonde. Si la question de son identité revient fréquemment tout au long du documentaire, ce dernier tente de le contre balancer par l’humanisation du héro. L’aspect bed-in, l’absence parfois longue de musique, ou les scènes filmées de son quotidien dans sa chambre d’hôtel sont les plus fort vecteurs de cette recherche d’humanisation et d’effet de réel. On peut cependant se demander l’intérêt de certaines scènes, assez longues, où l’on revoit par exemple Edward se remettre à plusieurs reprises du gel dans ses cheveux. Néanmoins, cet effet de réel est à nuancer. Cette exposition de faits se fait parfois sur fond de musique assez anxiogène. On note ainsi la volonté d’un aspect dramatique recherché.
Ce sentiment d’ambiguïté se retrouve aussi dans l’explication du système de surveillance généralisé. Face à un documentaire, on s’attendrait à davantage de vulgarisation des informations contenues dans le dossier. Or, on se retrouve parfois pantois d’avant l’énoncé de noms de logiciels informatiques ou de types et quantités de données. Cela a néanmoins le mérite de renforcer l’aspect effrayant d’un tel système de surveillance sophistiqué, et de donner raison à Snowden lorsqu’il affirme que toute la dangerosité se trouve bien dans cet aspect toujours plus technique des méthodes de surveillance. Paradoxalement, lorsqu’Edward explique le contenu des documents aux journalistes, on remarque chez eux, à l’inverse, une déroutante facilité à les comprendre.
Enfin, notons que l’on peut parfois se perdre dans l’aspect 2 en 1 du documentaire. Les allés-retours chronologiques dans l’affaire, ou la succession de scènes dans des endroits, époques et contextes différents, nous perd parfois. Cependant, on apprécie le suspens et l’épaisseur donnés à l’affaire lorsque la longue partie consacrée au huis-clos de l’hôtel est entrecoupée par des scènes de médiatisation mondiale de l’histoire.

NoémieVn
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le 15 févr. 2017

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Noémie Vn

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