CLASH (15,3) (Mohamed Diab, EGY, 2016, 97min)
Remarquable drame politique nous plongeant en plein cœur des émeutes égyptiennes de 2013 après la destitution du président islamiste Mohamed Morsi, opposant les frères islamistes et les partisans de l’armée. Mohamed Diab réalisateur connu pour le pertinent « Les Femmes du bus 678 » (2011) et ses prises de positions anti-Morsi s’empare de ces faits historiques pour en faire un étonnant exercice de style. L’image introductive nous montre une porte d’un fourgon de police, le décor est planté nous ne bougerons pas de cette unité de lieu ! La mise en scène virtuose, caméra à l’épaule, en totale immersion exploite ce faux huis clos avec beaucoup d’intelligence et d’inventivité. Faux huis clos en apnée, car malgré le cloisonnement, les journalistes et les manifestants arrêtés, aux convictions religieuses et politiques divergentes peuvent suivre les événements se déroulant à l’extérieur du véhicule blindé, par le biais des fenêtres à barreaux ou de la porte qui reste parfois ouverte avec des hors champs judicieux. Alliant la reconstitution minutieuse des émeutes (scènes assez impressionnantes) et un dispositif un peu théâtral comme une mise en abyme des impasses politiques et démocratiques de l’Egypte, le cinéaste confronte avec intelligence toutes les idées opposées dans cet espace clos. Cet aspect documentaire tente d’éclairer les enfermements doctrinaires par des dialogues assez bien écrits reflétant bien, sans manichéisme, chaque pensée de tous les protagonistes. Le réalisateur décline son scénario en distillant un suspense haletant, confondant les genres, thriller, angoisse, drame en incluant des scènes auscultant l’absurdité de certaines situations pour mieux éclairer une situation politique inextricable. On peut néanmoins reprocher parfois au scénario de ne pas pouvoir faire exister chaque personnage de façon plus autonome et une fin un peu moins pertinente. Le cinéaste dont l’influence du brillant « Lifeboat » (1944) d’Alfred Hitchcock est manifeste se confronte aussi avec un autre film surprenant en temps de guerre, le terrible « Lebanon » (2009) de Samuel Maoz. Venez-vous plonger en plein cœur de l’action par le biais de ce film d’action engagé vous menant au « Clash ». Passionnant, efficace, éprouvant, séduisant et bouleversant.