La médiocrité de Click est si nette, pleine et assumée qu'on en tire une satisfaction sans gêne ; car ce n'est pas le néant pour autant, c'est bien la médiocrité libérée, solide et vigoureuse. La mesquinerie est inutile et hors-de-propos. Pendant une centaine de minutes, une mine d'or est systématiquement tirée vers la bouse, des auto-suggestions inventives corrigées par une petitesse exemplaire. Dans le fond, tout se passe comme promis : les scénaristes sont les mêmes que sur Bruce tout-puissant (sauf Steve Oedekerk qui officiait en plus sur le film avec Carrey) et le film est dirigé par Frank Coraci, metteur en scène des premiers exploits au cinéma de Sandler (Wedding Singer et Waterboy en 1998).
Adam Sandler enfile avec sa lourdeur habituelle (pas antypathique) un costume de faux subtil et se balade dans un programme à la mesure de sa paresse et de sa beauferie. L'autre argument du film, c'est-à-dire le gimmick de la télécommande s'appliquant à la télé-réalité, rend l'affaire ludique mais n'est globalement employé que pour justifier quelques gags éparses. Sandler/Michael Newman peut revisiter son passé ; il peut se mettre en mode automatique pour sauter les moments saoulants de son existence : entre lui à l'intérieur et les auteurs à l'extérieur, c'est la compétition des bœufs sans curiosité. Mel Gibson était bien plus aventureux dans Ce que veulent les femmes.
Les opportunités offertes par la télécommande sont liquidées en quelques vannes et clics : Sandler déforme les gens, coupe leurs paroles, puis essaie de nouvelles teintes dans un autre scène. Quelques gimmicks secondaires sont insérés : le narrateur de Columbo, la femme absurde et old school dont on moque l'allure révulsante (constante avec Sandler). L'humour est bien gras, ce qui n'est pas un mal, sauf lorsqu'il coule dans des zones excessivement dégueulasses, type : baisons comme nos chiens ! Ou encore : papa et maman aussi se massent avant de -pas- faire l'amour ! Les personnages sont franchement ratés, notamment celui du magicien attribué à Christopher Walken.
Les acteurs ne sont pas responsables, au contraire leurs partitions sont généralement pleines d'énergie (on redécouvre David Hasselhoff, sur la route de Rodney Dangerfield!). La faute en revient à l'écriture, complètement grotesque, dont le caractère exécrable est rendu supportable par la profusion : autrement dit c'est misérable mais il y a tellement de matière qu'on ne peux s'ennuyer ; et toujours une porte ouverte à défoncer. Comme il ne faut pas juste rire, on s'oriente progressivement vers une morale niaiseuse typique, façon Family Man bituré et ardemment beauf. En effet, Michael est un énième papa bussinessman squizzant les moments tendres de sa vie au bénéfice de la réussite sociale et de la rentabilité financière.
On sent la volonté d'insérer une attitude philosophique, on voudrait appeler ça de la bonne volonté ; et puis c'est tellement aberrant ! Traînant toute la connerie générale en cristallisant avec sérieux, les élans dramatiques du dernier tiers sont d'une imbécillité, voir d'un non-sens suscitant une forme de 'respect' ironique. Allant au bout du pathétique, Click est marqué par un retournement phénoménal : eh oui, tout ceci n'était qu'un rêve ! Voyons le bon côté : c'était une leçon de vie, le message est passé et la souffrance nécessaire à l'histoire s'avère finalement virtuelle ! Que du bonheur ! Les enfants qui ont écrits ce film doivent accepter de s'orienter vers une autre filière, arrêter de voler du Champomy à l'étalage et de se branler sur les catalogues de lingerie de leur maman.
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