Cochon qui s'en dédit est un objet limite du cinéma-vérité : en 40 minutes Jean-Louis Le Tacon nous plonge dans le quotidien infernal d'un éleveur, montrant le productivisme comme un système aliénant et parfaitement déshumanisé. Le film, à visée documentaire, témoigne néanmoins d'un forme peu commune : voix-off chaleureuse, photographie granuleuse, visions cauchemardesques... Le moyen métrage fait figure de manifeste, évoquant Le sang des bêtes de Georges Franju et le cinéma de Pasolini dans sa volonté de faire fi des concessions et du bon goût.
Plus qu'un simple film sur la condition de l'ouvrier Cochon qui s'en dédit représente par extension une métaphore paroxystique du monde du travail, d'une réalité où le rendement constitue l'écrasement du prolétaire. Nous immergeant au plus près de l'élevage, au coeur des cris, de la chair porcine et des tombereaux de merde Jean-Louis Le Tacon suit à la trace le jeune Max, éleveur trop habitué à une puanteur ayant pratiquement remplacé son bleu de travail. Le film est d'une violence viscérale proprement inconfortable, essentiel pour qui souhaiterait se faire une idée du conditionnement et de sa réalité concentrationnaire. Un véritable choc cinématographique à travers laquelle plane l'ombre de Jean Rouch : indispensable.