Nous avons besoin de films comme Cocorico parce que ce sont eux qui font vivre le cinéma, assurent une fréquentation nécessaire au maintien des salles et au financement des œuvres véritables en offrant aux spectateurs un divertissement calibré sur leurs attentes d’une part et sur leur besoin de s’identifier d’autre part. En effet, il y a quelque chose de cathartique dans le long métrage, mais d’une catharsis vidée de ses considérations morales et esthétiques : la représentation de protagonistes définis par leurs préjugés xénophobes conforte le public dans ses mêmes préjugés, et son enthousiasme exclamatif exprime une adhésion idéologique qui est celle d’un racisme ordinaire des gens moyens souhaitant payer pour voir un film qui leur ressemble. Donner au peuple ce qu’il demande, tel n’est pas le propre de l’art, mais qu’importe puisque l’art n’est pas le propre de Cocorico : absence de mise en scène, restriction du comique aux dialogues qui, à leur tour, se réduisent à un concours de vacheries limitées à l’énumération mécanique de stéréotypes poussiéreux et pourtant, par la réactualisation opérée, revivifiés. L’énergie des comédiens assure un semblant de spectacle, c’est-à-dire qu’elle occupe l’œil et suffit à porter le récit, les retournements et la clausule. La nullité formelle, c’est le temps béni du popcorn et du téléphone portable, que l’on peut consommer sans modération sans perdre ne serait-ce qu’une miette de ce pseudo-art dépourvu de nécessité, mais fort utile pourtant.