Premier film intéressant, compartiment tueurs est un polar honorable à défaut d’être véritablement marquant. S’il se laisse suivre avec grand plaisir, c’est davantage pour son casting 5 étoiles —on y retrouve notamment les monstres sacrés Yves Montand et Simone Signoret que Costa Gavras avait rencontré alors qu’il était assistant pour Le jour et l’heure de René Clément—, que pour son scénario ou sa mise en scène, même si cette dernière est tout à fait honorable. Est-ce la présence des deux acteurs précités, où les quelques années qu’il a passées aux côtés d’Henry Verneuil, Jacques Demy ou René Clément qui lui ont permis de composer avec un tel défilé d’acteurs alors qu’il signe son premier film ? Peu de cinéastes peuvent en tout cas se targuer d’avoir commencé avec si belle affiche.
Bien loin de la puissance politique de ses futures oeuvres, Compartiment tueurs est un film didactique qui trouve son intérêt dans l’ironie mordante de ses dialogues. Un humour très présent qui fait autant sourire qu’il prête à discussion. Entre la petite romance impliquant Jacques Perrin en mode Gaston Lagaffe et les maladresses d’un police à deux vitesses, l’objet même du mystérieux meurtre à résoudre se fait de plus en plus ténu, jusqu’à devenir finalement presque accessoire. Pour preuve, sa résolution est particulièrement cavalière, précipitée, sans grande idée.
Déséquilibré, manquant un peu d’ambition, Compartiment tueurs n’exploite pas totalement son potentiel de départ, même s’il augurait déjà des belles collaborations à venir entre un réalisateur qui trouvera plus tard son style et un Yves Montand qui abandonnera par la suite son accent méridional pour porter avec tout l’aplomb qu’on lui connaît les films phares de Costa Gavras, à commencer par Z, quatre ans plus tard.