Oedipe reine
Dès la première scène de Compte tes blessures, sorte de cri blessé d'un jeune chanteur tatoué, on se souvient que Morgan Simon, dès ses premiers courts métrages, n'a jamais cherché à être aimable...
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le 31 janv. 2017
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Dès la première scène de Compte tes blessures, sorte de cri blessé d'un jeune chanteur tatoué, on se souvient que Morgan Simon, dès ses premiers courts métrages, n'a jamais cherché à être aimable. Avec des titres accrocheurs comme "Essaie de mourir jeune" ou "Réveiller les morts", où l'on pouvait croiser des acteurs présents dans ce premier long métrage : Nathan Willcocks, Kévin Azaïs (de plus en plus exceptionnel) ou encore Julien Krug, il a donné à voir des garçons aux relations familiales tendues. Le réalisateur explore ici plus avant les relations père-fils avec un sens de l'émotion très particulier qui est un peu sa marque de fabrique. L’irréel finira par s'inviter à travers une très grande et belle scène (cruelle et tendre à la fois) dans cette chronique d'un quotidien pourtant très réaliste.
On suit en effet la relation tumultueuse et faite d'humiliations entre Vincent et son père (poissonnier fatigué). Vincent qui n'attend qu'une marque d'amour, de reconnaissance d'un homme qu'il a tatoué sur son cou, au côté de sa mère décédée. Les regards et les mots échangés sont forts. Mais ce n'est rien comparé à l'arrivée de Julia dans la vie des deux hommes. Cette femme indépendante et sans âge cristallise les tensions autant qu'elle permet de les faire éclater. Rivalité non dite puis soudain explosive. Qu'aime-t-elle chez le père que le fils de voit pas ? Que parvient-elle à aimer chez le fils que le père ne voit pas ? Ce "pont sur la rivière" (dixit Beaupain et Honoré) qui va du fils au père, du père au fils est tour à tour une groupie sage, une jeune fille délurée, mais aussi une femme aimante, pimpante à côté d'un homme (le père) fatigué par la vie, nostalgique (il fustige Pepsi et Cola, refuse son temps).
Le film fait naître des émotions, comme au creux du ventre, quand les mains se touchent en secret, quand les regards se croisent, quand les corps se rapprochent. L'inattendu surgit. La chronique de la jeunesse, du besoin de se différencier en ressemblant finalement à tout le monde, est aussi parfaite. Monia Chokri, toujours aussi intemporelle, offre du sel à cette chronique du désamour entre père et fils. Quant à Kévin Azaïs, il est habité, il porte son personnage, nous transporte. Le voilà en train d'éclore au cinéma dans un rôle d'enfant mal aimé qui le rapproche peu à peu d'un de ses proches : l'acteur Vincent Rottiers qui, dans "Je suis heureux que ma mère soit vivante", poussa un cri de haine qui se révéla finalement être un cri d'amour qui disait simplement : regarde moi j'existe, j'ai le droit d'être aimé. Bouleversant. Un premier film prometteur, vraiment.
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Créée
le 31 janv. 2017
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