Que diront les générations futures de nos sites/applis de rencontres ou de nos yogas vegan et autres paddle yoga? Trouveront-elles dérisoire notre union fusionnelle avec le monde virtuel et notre fracture avec la réalité?
C'est cette fracture que l'un des premiers plans symbolique veut annoncer (bitume lézardé), lorsque tous ces nerds débarquent avec leur gros matos dans un hôtel quelconque dans un bled perdu des États-Unis. Affrontement de l'homme contre la machine, fantasme inavouable de l'union des deux, solitude du corps et isolement de l'esprit, volonté de dépassement de soi, ... voilà les principaux thèmes traités dans ce computer chess, ovni difficile à localiser tant il s'affranchit des codes du cinéma (narration hasardeuse, personnages fluctuants, caméra tremblante feignant l'amateurisme de même que les acteurs non professionnels semblent-ils, ...).
Mais à tant s'éloigner de ce qui fait l'essence du cinéma, en cherchant à tout prix à se parodier soi-même au moyen d'une distanciation ironique, il s'égare du sujet principal et n'arrive nulle part. Si une critique de la société moderne accro aux nouvelles technologies se glisse sournoisement dans les personnages et leurs actions, le reste demeure vide, sonne creux et ne revêt aucune forme claire (le tout divaguant entre mockumentaire et théâtre de l'absurde). De même l'ambiance d'étrange familiarité, rappelant (très) vaguement Eraserhead (la thématique esthétique sur le noir et blanc aidant), qui enveloppe certaines scènes se trouve aussitôt annulée par le souci de coller au réel en direct du tournoi.
Bref, faire un film indé, c'est cool mais encore faut-il savoir bien le faire, sinon on frise le ridicule (le serpent se mord la queue, dira-t-on), on perd son public et on prend son pied solo (ça devient alors de l'onanisme).