« What do you say we get down to business ? » ED WARREN

Dans un registre horrifique capable du bon, comme du moins bon et soumis aux plus viles bassesses de la part des studios, il était loisible de placer tous nos espoirs en James Wan pour assurer la relève, lui qui un an après son interlude sur Furious 7 avait affiché son souhait de vouloir retourner vers le genre l’ayant vu éclore en tant que metteur en scène.

Après la catastrophe critique de Annabelle, le prequel de The Conjuring, la stratégie s’imposait d’elle-même pour New Line Studios : rappeler James Wan pour reprendre les rênes du bateau et tripler le budget, dans l’espoir de sortir cette franchise déjà balbutiante de sa propre ringardise.

James Wan va ramener sur grand écran le couple Warren pour une nouvelle affaire tirée de faits réels. Le cas Enfield est l’une des histoires de poltergeist les plus célèbres et étrangement, jamais le cinéma ne s’était emparé de ces événements pour tenter de nous faire frissonner.

The Conjuring 2 sort en 2016 et devient rapidement une grosse attente de la part des aficionados du genre horrifique.

Les jumeaux Chad Hayes et Carey Hayes sont aussi de retour à l’écriture du scénario après The Conjuring. Cette fois, James Wan va aussi s’impliquer de le processus d’écriture. À vouloir trop en faire, les scénaristes perdent complètement le contrôle de leur récit. Trop long d’une bonne demi-heure, le film repose sur un argument bien trop ténu pour remplir ses plus de deux heures. Le métrage se contente d’enchaîner les scènes, certes généreuses, mais trop décousues, comme une enfilade de sketch horrifiques, des frissons immédiats, mais superficiels. En l’état, on comprend mal pourquoi le metteur en scène et scénariste lance tant de pistes qu’il n’explore presque jamais.

De même, les esquisses de psychologie familiale dressées dans la première partie, notamment les relations qui unissent les enfants, sont complètement abandonnées sitôt les époux Warren sur le devant de la scène. Une mécanique forcée, qui révèle alors combien l’ensemble tient à une myriade d’hommages et de références, intelligemment disposées, mais jamais vraiment digérées ou interrogées. Elles mettent en lumière l’absence d’écriture des personnages, réduits à des fonctions primaires.

Bien meilleur réalisateur que scénariste, James Wan paraît avoir étouffé son propre film à force d’ambition et de générosité, ne sachant pas comment doser les innombrables ingrédients à sa disposition. Amityville, une nonne mutante sous acides, un démon septuagénaire et le Crooked Man (véritable révélation du film grâce à l’incarnation de Javier Botet), les entités démoniaques sont beaucoup trop nombreuses.

Heureusement le couple de démonologue a un approfondissement de leur relation. Toujours incarnés par Patrick Wilson et Vera Farmiga, ceux-ci sont parfaits, ayant préparés leurs rôles en rendant visite à la vraie Lorraine Wilson en 2015 dans le Connecticut.

Après une introduction à Amityville, les époux Warren se rendre sur le cas Enfield dans une banlieue résidentielle de Londres. Le lieu est propice au frisson, notamment grâce à une réalisation soignée qui n’a aucun mal à installer une ambiance angoissante. La caméra de James Wan se déplace avec élégance dans les couloirs sombres de cette petite maison mise en valeur par le directeur de la photographie Don Burgess. Il va jouer habilement avec les effets de clair-obscur pour susciter l’inquiétude, amplifiée par un remarquable travail sur le son.

C’est sur le cocon familial incarné par la troublante Frances O’Connor et les quatre enfants : Madison Wolfe, Lauren Esposito, Patrick McAuley et Benjamin Haigh que le scénario va focaliser le principal enjeux hors-paranormal. La difficulté de cette mère pour élever seule ses quatre enfants aurait alors pu apporter au film d’horreur un angle de lecture social, mais dans la façon dont Ed Warren est porté en héros en jouant le père de substitution (avec notamment cette scène chantée) c’est irrémédiablement vers un discours défenseur des valeurs familiales que se dirige le long-métrage. L’insistance faite sur la ferveur chrétienne des deux héros, qui se retrouve exacerbée par leur lutte contre ce démon aux allures blasphématoires appuie plus encore le sous texte ouvertement bien pensant de cette production.

Le film est formidable dans ses meilleurs moments de frousse, mais aussi trop inégal sur la durée. La durée dérègle le rythme de l’ensemble, alors que la première partie part de fort belle manière. La faute à un scénario qui s’éparpille, prend son temps là où il ne faut pas et se perd parfois dans des discours dont le film n’avait pas besoin. Difficile de s’y retrouver au milieu d’une intrigue qui veut se la jouer complexe en incorporant plusieurs esprits au récit mais qui ne s’assume pas jusqu’au bout en livrant un final somme toute maladroitement expédié.

Le compositeur Joseph Bishara revient lui aussi se joindre au métrage, il était aussi le compositeur de The Conjuring et Annabelle. Sa bande-son n’a rien de remarquable, mais reste convaincante pour appuyer les moments horrifiques de James Wan.

The Conjuring 2 perd toute son attractivité dès lors qu’on sort des scènes de terreurs. Pourtant, on s’en contente. Face à la faible concurrence, ce second volet s’impose par défaut comme le haut du panier. James Wan arrive encore à faire illusion par sa maîtrise, mais pas sûr que la recette continue éternellement de fonctionner.

StevenBen
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le 11 sept. 2023

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Steven Benard

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