Vous aimez les huis-clos aux atmosphères lourdes et aux confrontations psychologiques tendues comme les sacro saints 12 hommes en colère, vénérés du Sens Critiqueur moyen ?
Cette conférence surclasse en tout point son illustre prédécesseur.
Là ou Lumet ne présente qu'un seul personnage qui se retrouve seul déclencheur du scénario et bien isolé à mon sens pour en faire vivre l'intrigue, cette conférence nous en présente une demi douzaine du même acabit (un lèche cul, un cochon salace, un comptable cupide, un discret en souffrance, une lavette, un gentil, etc..) sous l'égide d'un maître de conférence qui n'est autre que le futur célèbre « boucher de Prague » en personne.
Dans un bel élan d'optimisme Lumet tentait dans son film de démontrer qu'un homme détenait le pouvoir de changer la marche forcée des choses par son unique force de conviction ; Frank Pierson nous en offre une séduisante antithèse. Certains vieux briscards sachant bien comme lui que la réalité est malheureusement la plupart du temps tout autre, et que ce que je nommerais l'adversité profitera toujours de l'isolement d'une personne de bonne volonté pour la frapper sans vergogne. Ghandi, M Luther King .. et bien d'autres nous donnent les exemples qui restent à méditer sur tous leurs aspects. Et surtout, à une histoire tirée par les cheveux au point de m'en avoir arraché une touffe, Frank Pierson substitue la force de l'Histoire (avec une majuscule), la force du crédible et aussi celle d'un enjeu sans commune mesure avec la vie d'un homme seul. Pathétique mais malheureusement vrai.
Car l'auteur s'est appuyé lui, sur des faits. Des bombes en guise de faits, puisqu'il a souhaité nous détailler la mise en place de la « solution finale ». Après tout, Lumet aussi avait le droit de s'appuyer sur quelque chose de concret afin de bénéficier de l'absence du doute et promouvoir ainsi la force de conviction de son intrigue, et son réalisme. Ce qu'il n'a pas choisi.. et seule subsiste sa mise en scène.
C'est fait. Alors, cette conférence de Wannsee est celle à laquelle ont participé les hauts-dignitaires du régime nazi en charge de la question juive, avec pour objets la méthode de comptage des populations et celle de la méthode d'élimination de cette « race », « déplacement » (un "déplacement vers l'au delà" synonyme d'extermination) ou stérilisation. Ces débats ne sont de fait que des conversations parfaitement gratuites, ce qui renforce d'ailleurs tout le côté pathétique de l'observation, car les choix définitifs et leurs détails sont déjà clairement définis et fixés par avance par le guide. Ils n'ont réellement pour but que d'étouffer dans l’œuf tout esprit de rébellion au sein des instances dirigeantes, et faire officiellement taire toute idée de regret.
Ce téléfilm est une merveilleuse reconstitution d'un moment clé de l'Histoire humaine. Les mécanismes psychologiques des personnages sont superbement transcrits par de très bons acteurs dans une mise en scène honnête ; tout cela nous permet de mieux comprendre l'horreur de la folie humaine lorsqu'elle s'exprime, voire de la ressentir avec dégoût durant certains moments fort du huis-clos.
J'aimerais bien voir La conférence de Wannsee d'Heinz Schirk, dont il est un remake ... pour le comparer une nouvelle fois bien sur ;)