Un film dont on ressort avec la tenace impression d'avoir vu le remake américain de Sissi & Moi, que j'ai vu il n'y a pas si longtemps et dont je garde une assez forte impression. Non pas que je l'avais adoré, non, puisque l'héroïne, dont on nous a vendu une version de conte de fée quand nous étions jeunes, est une tête-à-claques assez phénoménale, dans mes critères, et que la suivre tout au long d'une fiction dont elle est de tous les plans n'est pas une partie de plaisir. Mais bon, j'étais ressortie de là satisfaite que le mythe ait été généreusement écorné, tiens prends ça la princesse Pépette avec tes crinolines, comme vengée de clichés tartouilles imposés à des générations de petites filles qui n'en avaient pas tant demandé. C'est vrai qu'ici aussi, elle déguste, la Sissi. Mélancolique, tyrannique, obsédée par son apparence, capricieuse, et j'en passe, on ne peut pas dire qu'elle soulève l'enthousiasme. Mais il y a une sorte de satisfaction sourde à dynamiter ainsi les images féminines frelatées qui imposaient aux filles des rêves à la gomme de prince charmant et de couvre-feu à minuit. Pourtant, François-Joseph n'est présenté dans aucun des deux films comme un macho fini. Au contraire, on éprouve plutôt de l'empathie face à ce gars gentil, accablé de responsabilités, dans un monde en mutation, et flanqué d'un bâton merdeux, comme disait ma grand-mère, écorché vif et instable. Vous me direz, les bâtons merdeux ne sont pas toujours responsables de leur état, et on compatit effectivement devant l'artificialité de la vie de cour imposée à Sissi, bien contre son gré. Une autre qu'elle aurait fait contre mauvaise fortune bon cœur, sacrifié au protocole en se préservant un espace de liberté le reste du temps. Mais voilà, c'était une Lady Di avant la lettre, incapable de se plier aux diktats de sa condition. Là dessus, rien à redire, on n'est pas des bœufs, les filles. Après, deux heures à subir les revirements et atermoiements et larmoiements et petits sévices d'une enfant gâtée en rupture avec son milieu, c'est un peu long. Vicky Krieps n'y est pour rien, pas plus que le reste de la distribution, qui fait son boulot. Nan, c'est probablement moi, en tant que spectatrice, qui peine à me couler dans une narration statique et répétitive, truffée d'anachronismes, exprès, et déterminée à planter le décor jusqu'à la toute dernière seconde, sacrifiant ainsi ce que la narration aurait pu avoir d'épique. On est sur un mode intime, évidemment, et les fastes de la cour n'apparaissent que brièvement, c'est certain, mais je n'aurais pas détesté des scènes plus décisives, plus enlevées, plus... je ne sais pas, moi, plus cinématographiques. Question de goût. Je peux quand même m'attarder sur le personnage de la fille de Sissi, délaissée par sa mère, manipulée par son père, la tête farcie de fariboles sur sa condition de femme à venir. En cela, ses confrontations avec sa fantasque de mère sont plus éloquentes que n'importe quel discours sur le conditionnement farouche des femmes dans les sociétés traditionnelles. Et ça, c'était bien vu. Bon, s'il sort une 3ème biographie compatissante sur Sissi, rappelez-moi de ne pas me laisser tenter...

Créée

le 23 sept. 2024

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