De David Cronenberg on connaît le cinéma ''dégoûtant'' de ses débuts, des films d'horreurs uniques mêlés à de la science-fiction. Ces dernières années le réalisateur canadien s'est révélé fin psychanalyste jusqu'à raconter la relation décousu entre Carl Jung et le docteur Freud. Avec Cosmopolis Cronenberg se renouvelle une fois encore tout en gardant sa patte si singulière. Le réalisateur du Festin nu réadapte une nouvelle fois l'inadaptable, un roman de Don DeLillo publié en 2003. Et pourtant David Cronenberg lui-même avoue n'avoir jamais écrit un scénario aussi rapidement, six jours, réutilisant tels quels les dialogues de l'auteur américain. Les dialogues de Don DeLillo accouplés à la mise en scène de Cronenberg ont fait des merveilles.
Cosmopolis raconte l'histoire simple d'un jeune homme milliardaire de 28 ans, Eric Packer, qui décide de traverser New-York pour se couper les cheveux malgré le trafic chaotique dû à la présence du président et l'enterrement d'une star du rap soufie. Eric Packer, sorte de trader nonchalant, a tout misé sur la chute de yuan. Cependant la devise chinoise n'arrête pas de fléchir et le jeune homme risque de tout perdre. Mais le plus important pour lui reste de se couper les cheveux ! Au cœur de sa limousine ''prousté'', il n'y a guère que le cours de la bourse hors de ses tracas personnels qui le préoccupe. Dehors la rage populaire gronde, on jette des rats dans les restaurants, on délabre son véhicule sans qu'il ne jette un seul coup d’œil par la fenêtre.
Eric Parker c'est le symbole même du capitalisme, enfermé dans son monde complètement étanche, blindé et insonorisé (métaphorisé par la limousine) il ne voit pas ce qu'il se passe autour et la haine des 99% à l'égard des 1% qu'il représente. Il faut dès lors saluer l’œil visionnaire de Don DeLillo pour une histoire qui fait aujourd'hui l'actualité avec le mouvement Occupy Wall Street qui a eu lieu peu avant la sortie du film.
Mais Cosmopolis reste un pur produit Cronenberg. Le film est teinté de la même atmosphère austère que l'on retrouve dans toute son œuvre. Le canadien réalise là une véritable prouesse de mise en scène, il arrive à faire vivre le film quasi entièrement au sein des murs étroit de la limousine, alternant les angles de caméra pour ne jamais endormir son spectateur. Une efficacité qui révèle une certaine virtuosité peu vue dans la filmographie du réalisateur. Et puis il y a le choix Robert Pattinson, étonnant mais qui se révèle juste. Même sans user d'une large palette d'émotions Pattinson incarne avec talent la figure blafarde d'Eric Packer.
Celui-ci bientôt ruiné est confronté à un Paul Giamatti en roue libre dans une drôle de scène finale de plus de vingt minutes qui fait malheureusement perdre le film en intensité. Le pauvre homme veut tuer celui qui incarne selon lui le capitalisme, va-t-il y arriver ou se fera-t-il embobiner par Packer ? C'est la fin de Packer, mais est-ce la fin du capitalisme ? La fin est en suspens, seul le futur nous le dira.
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