Trincamp. Son usine. Son club de foot. Son bar des sports. Ses autochtones.
C'est dans ce petit coin de France loin de tout. Ces petits coins de province qui sentent bon les vieilles familles de notables, le kirsch d'après repas et les médisances de salon de thé.
Dans ce microcosme de balades digestives sur la promenade et de relents d'eau de Cologne à la lavande, évolue François Perrin.
François Perrin est un garçon sans souci.
Ailier gauche dans l'équipe de Football du FC Trincamp, qui par miracle va jouer un 8ème de finale de coupe de France. Employé dans l'usine de la petite ville où il perd son temps pour de l'argent et qui appartient au président du FC Trincamp.
Il travaille aussi dans une jolie mignonne que son para de mari délaisse pour sauter en parachute sur des contrées lointaines et belliqueuses.
Bref, la petite vie de province de François est réglée comme du papier à musique un peu vieillot et semé d'aventures sans grandes surprises.
Lors d'un entraînement, Perrin bouscule involontairement et sans gravité Berthier, joueur vedette du FC Trincamp, qui roule sur la pelouse comme un Rital de la grande époque.
A partir de là tout se barre en couille. Sa petite vie toute tracée s'écroule.
Devenu le rebut de Trincamp, imaginez !
Avoir osé donner un coup d'épaule au meilleur joueur du club à l'entraînement, ça méritait bien la mise au pilori communale et la vindicte populacière de ces rednecks à bérets.
Viré du club. Cumul des mandats oblige, forcément viré de son taf à l'usine par l'omniscient Sivardière (l'excellent Jean Bouise) qui en bon provincial sait mêler tout les pouvoirs : Politique, financier et sportif pour régner en père tranquille sur sa seigneurie de bas-du-front.
Viré des fesses de sa douce par la force des choses, son cocu de para prenant sa retraite et préfère dorénavant sauter sur le cul de sa femme que sur la cuvette de Diên Biên Phu.
Viré du bistrot "Le pénalty" après avoir répondu au foutage de gueule de l'autre con de Berthier par un coup de boule qui achèvera de le placer au rang d'enfoiré de première et d'infâme ingrat par une population qui lui avait pourtant renouveler sa confiance en lui laissant la chance de ramasser ses poubelles dégoulinantes.
Son sac sur l'épaule, Perrin quitte Trincamp sous l'opprobe générale.
Mais les emmerdes ne sont pas finies. Une tentative de viol sur un joli petit lot perpétré par le Zidane "Trincampais" Berthier. 2 témoins proches du club. Des frisettes, une moustache.
Allez hop ! C'est Perrin qui a fait le coup. En plus, il est fini le môme, il lui reste plus rien. Alors un peu plus, un peu moins, hein !!
En cabane le François ! Comme ça...Parce qu'il a les cheveux longs.
Mais la revanche est proche, François. C'est le bus des joueurs ta revanche. Ce bus qui se fout en l'air. Ces chevilles tordues et ces épaules luxées.
Il n'en reste pas bézèf des bouffeurs de gazon en état de marche.
Vers qui on se tourne, hein ?
Ben ce pauvre footeux maltraité qui joue pour ses compagnons d'infortunes entre ces 4 murs gris.
Elle est là sa revanche !
Le besoin de ses pieds, de son talent de footballeur.
De cette nécessité qu'est devenu François Perrin pour leurs petits desseins footballistiques, cette nécessité qu'ils veulent faire passer pour une main tendue.
Cette vulgarité d'esprit et ce nonosse qu'ils lui tendent pour qu'il vienne croquer sans grogner et la queue basse.
Sa revanche ce sont ces 2 buts qui expédient Trincamp en quarts de finale.
Une star ! Perrin Président ! Perrin Président ! ! !
Voilà c'que ça gueule dans les rues de Trincamp envahit de supporters en bob "Ricard". Ceux- là même qu'il y a un mois le foutait en cabane pour couvrir les conneries de leur Berthier adoré, le cajole, le couvre de cadeaux et de saluts amicaux.
Mais il n'a rien oublié François !
La vengeance est un plat qui se mange froid.
C'est à une études de moeurs très "Chabrolienne" (Je ne saurais trop vous conseillé la liste et les critiques "Lazeinienne" sur Tonton Claude http://www.senscritique.com/liste/Tonton_Claude/395073 ) que se livre Annaud.
La province ! Son micro-climat intellectuel, ses haines tenaces et ses non-dits dangereux.
C'est aussi le Football. "Décervelleur" officiel d'une France qui peut enfin haïr ses voisins en toute tranquillité. C'est une fessée à la bêtise de "ces gens heureux qui sont nés quelque part" comme chantait Tonton Georges.
Le regard trop court qui ne va jamais plus loin que le panneau de bienvenu de leur cité.
C'est le silence coupable, la sentence erronée qui vient punir l'innocent de troubler la douce quiétude réactionnaire de ces petites villes au ventre rond, endormies lourdement et que rien ne viendra réveiller.
C'est une certaine idée de la France que viendront troubler les cheveux longs et le franc-parler d'un Dewaere impérial. Dépassant par sa seule présence un scénar un peu facile et faisant d'un rire qui aurait pu être gras et un peu trop franchouillard; un rire plus jaune, plus amer.
Représentant à merveille cette révolte. Le ras le bol de ce tampon "Marginal" que les bons citoyens frappent irrévocablement sur le front de celui qui marche à côté du chemin.
Une comédie à l'image de ces grandes comédies Italiennes parfumées au soufre.
Un acteur magnétique et des seconds rôles superbes.
Un film Drôle et intelligent. Social, Contemporain.
Et toujours ce côté doux-amer, ces dents qui grincent au milieu d'un rire. L'assurance des grandes comédies.
Comment ça la "Comédie Française" c'était mieux avant ??!!