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Les nouvelles technologies portent de plus en plus à débat. Certaines participent au chômage, d’autres sont plus controversées d’un point de vue éthique et enfin d’autres sont souvent mal perçues car mal comprises. Mais chacune permet des prouesses techniques dont on ne soupçonnait même pas la possibilité il y a encore 10 ans. On est encore loin des voitures volantes du Cinquième élément, ne vous emballez pas, mais avouez que aujourd’hui, le principe de réalité augmentée paraît bien étrange. Enfin quoi, le titre lui-même est aberrant, comment peut-on rendre la réalité plus réelle ? Et pourtant, sur fond humoristique, Creative Control tente d’y répondre et d’apporter un semblant d’esprit critique sur la question. David, un employé d’une firme importante, tente de développer des lunettes de réalité augmentée. Ces lunettes sont capables de recevoir des appels visio, d’y répondre, de se créer un avatar et d’innombrables autres choses, le tout contrôlé avec la main. Il se retrouve avec cet outil entre les mains dont il doit gérer la production et le marketing. Bien évidemment, de nombreux éléments se mettront en travers de sa route, mettant sa vie sociale, sentimentale et professionnelle à rude épreuve.


Quand on parle de réalité augmentée, on pense rapidement aux lunettes Google (projet actuellement au point mort mais dont le film s’inspire très clairement) ou encore à Pokémon Go qui avait bien buzzé à l'époque. L’un semble futuriste quand l’autre ne faisait que mêler habilement les diverses technologies de géolocalisation du téléphone. La première question que l’on se pose est souvent « à quoi cela peut-il concrètement servir ? ». A part d’option plus que dispensable, et c’est vrai. Qui a foncièrement besoin de Pokemon Go ou de ces mystérieuses lunettes Google ? Et pourtant le réalisateur apporte la réponse la plus simple mais la plus pertinente, l’important ce n’est pas précisément de savoir ce que cela nous apporte, mais ce que toute personne, à l’esprit créatif débordant (ou à l’insatiable soif d’argent, c’est selon) peut faire avec. Cela nous ramène à l’informatique et à la création d’internet, tous ces gens qui ont créé des choses folles grâce aux différents langages informatiques. L’évolution ne se fait pas en créant uniquement des choses utiles, elle se fait en créant, adaptant, modifiant tout ce qui est à notre portée et surtout en dépassant constamment le potentiel de chaque création. En ce sens le film semble pousser les gens à tester leur environnement pour produire des choses nouvelles. Mais avec cette technologie qu’ils ont à disposition, à savoir des lunettes capables de créer un avatar se basant sur les traits physique d’une personne, le réalisateur questionne sur une forme d’éthique et de morale. Aujourd’hui la plupart des technologies informatiques, application ou sites internet recueillent quasiment toutes les informations qui circulent au point d’avoir une majeur partie de votre vie privée enregistrée quelque part et certainement disponible pour d’autres personnes. Evidemment c’est à chacun de faire attention à ne pas divulguer tout et n’importe quoi, mais comme le prouve la psychologie du héros, difficile de ne pas succomber à la tentation quand on possède un outil incroyablement valorisant entre les mains et que tout le monde le possède également. Ce surplus d’option amène à tout vouloir tout de suite car tout est à notre disposition et nous pousse ainsi à consommer de manière excessive.


Creative Control propose donc ici une critique de la société de consommation mais tente de le faire avec humour. Ainsi ce qui semblait très conceptuel au départ, avec des personnages très étranges, une image en noir et blanc et de la musique classique, tombe dans une sorte de mélange d’intentions un peu difficile à cerner. Le noir et blanc s’apparente à la technologie toujours plus lisse et épurée, semble-t-il, et la musique classique peut, au choix, s’interprêter comme une volonté d’un retour à quelque chose de plus raffiné ou de montrer que dans une ère très techno musicalement (style plus conventionnel pour un tel film) le classique reste toujours aussi indémodable. Ainsi lorsque l’avatar créé par David apparaît en couleur, donnant le sentiment que c’est la seule chose poétique ou admirable de la situation, on se demande si cela témoigne d’une volonté de communiquer quelque chose, comme le fait que tout ce qui est créé par l’homme n’est pas foncièrement une mauvaise idée par exemple, ou si c’est simplement pour se donner un genre. Car en l’occurrence, cet avatar est clairement le point noir de l’histoire, c’est l’élément précis qui met à nu tous les protagonistes et révèle leur véritable nature. Et ce jusqu’à la toute fin.


D’ailleurs c’est aussi la base du côté humoristique de ce long métrage qui reflète en grande partie la critique de la société dénoncée dans un premier temps par l’aspect technologique. Dans le fond, le film ne raconte qu’une simple histoire d’infidélité entre les personnages. À ce niveau on préfèrera nettement la scène des Infidèles entre Jean Dujardin et Alexandra Lamy, qui non contente d’être maîtrisée d’un point de vue mise en scène à en plus le mérite de ne pas durer aussi longtemps. Pour autant, le fait de mettre en parallèle la culture technologique d’aujourd’hui à la sexualité des gens est plutôt bien vu. On retiendra qu’au lit, au boulot ou dans la vie de tous les jours, on ne laisse plus le temps au plaisir de consommer. Govindas en est un excellent témoin lorsqu’il réplique que l’acte sexuel se fait à deux, et non tout seul. Il en va de même pour David qui ruine complètement ses relations par total manque d’écoute et de considération et qui, dans le cas de Sophie, anéantit totalement ses chances avant même de les obtenir. Malheureusement, le gros problème des histoires d’infidélité, c’est qu’elles n’ont aucune espèce d’originalité. C’est toujours strictement le même schéma, c’est encore plus prévisible que le déroulement d’un film Marvel. Alors quand en plus l’histoire nous met en scène une double infidélité, on jubile à l’idée de n’avoir doublement aucun suspens jusqu’à la fin du film. On pourra également noter le manque total de subtilité dans la construction scénaristique de ces relations qui donne le sentiment que pour éviter de mettre encore tout sur le dos de la femme, c’est l’homme qui faute (il faut par ailleurs n’avoir aucun goût pour tromper une femme comme la sienne…). Mais par soucis d’égalité, la femme le fait aussi, et tout ça de manière très grossière. Si encore on ressentait vraiment le poids d’un amour entre deux êtres, mais non, tout se fait par pure naïveté et esprit de vengeance, tout se produit par une simple volonté de consommer. Etait-ce finalement ça le message ? Consommer tout ce qui est à notre portée, y compris le sexe ? Ce ne serait pas totalement idiot mais extrêmement maladroit. D’autant plus avec une telle fin et le discours pourtant génial de sa femme en contraste avec la réaction dépitée du héros. Le véritable message final est que la vie est un cycle sans fin, comme le dit Reggie durant le film. Celle-ci se répète inlassablement, malgré les changements et le rythme effréné de la consommation. On a beau assouvir un besoin immédiat, un autre naîtra dans les instants qui suivent et ainsi de suite.


Creative Control se trouve donc être ce genre de film très discutable qui, tout au long de l’histoire, cherche sa propre identité. Avec une force visuelle très marquée et une histoire assez singulière dans la forme, le long métrage reste un peu le cul entre deux chaises. Difficile de proposer une critique relativement acerbe de la société de consommation sans vraiment sortir la tête du politiquement correct tout en étant drôle. On ne peut pas faire tout ce qu’on veut de la manière dont on le souhaite. Il en résulte que malgré une esthétique générale recherchée, le message est beaucoup trop facile pour être compris ou vraiment impactant. Il est pertinent lors de quelques scènes, notamment celle du tournage de la publicité ou encore celle de la réunion où David doit gérer 3 à 4 conversations simultanées. En dehors de ces rares fulgurances, le film ne fait que survoler ses intentions sans jamais vraiment mettre complètement le pied dedans pour shooter dans tout ce qui passe.

Notry
5
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le 21 mai 2018

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