Creed avait été une surprise, un film étonnamment très bon sur une passation et une filiation forte et en pleine adéquation avec la saga. C'est sans surprise qu'une suite vit le jour, cette fois se portant sur la mémoire des pères et la légende que l'on se construit. Creed 2 est dans la lignée de ce qu'a construit Stallone au fil des années avec sa saga. Comme un héritage personnel, il revient sur un moment fort de celle-ci : Ivan Drago, afin de mieux se livrer.
Creed 2 est donc le combat entre les fils, désireux d'honorer leur nom et de vaincre leur honte. Sylvester Stallone semble apaisé, léguant l'histoire d'une vie à un jeune homme encore dans un besoin paternel mais grandissant. Là est le point fort du long-métrage, il s'attarde sur ses hommes. Il se concentre d'autant plus sur les émotions, certes faciles mais terriblement vraies, celles qui façonnent des vies, que le film est encore une fois plus qu'un simple film de boxe. La saga Rocky est intéressante par ses messages. Sylvester est un homme bon, qui a créé un gars sympa. Un homme qui vit, simplement et sincèrement. Ce nouvel opus permet à Sylvester de se confier une nouvelle fois par l'intermédiaire de ce qui a fait de lui une légende, une des ces dernières au cinéma que l'on espère voir encore et toujours. Parallèlement, Dolph Lundgren (bouleversant de gravité) entraine son gamin dans la peur d'être oublié, de n'être rien, et à jamais. L'instrumentalisation et le rapport de force sont partout. Buddy Marcelle propose un match, le public et les journalistes réclament le combat, l'Etat profite de celui-ci, Ivan endigue son fils, Adonis s'utilise lui-même. Le film est alors sur la libération de soi, des autres, du passé ; un héritage qui doit se préparer non pas avec autrui, mais avec soi-même.
Creed 2 est donc avant tout un film d'hommes face à une responsabilité trop haute. D'autant plus que chacun vit de son côté, amenant leur histoire personnelle au sein du ring. Steven Caple Jr. succède à Ryan Coogler (Black Panther) avec talent. Sa mise en scène est au service de ces histoires, la réalisation est toujours aussi immersive aussi bien dans les scènes d'affrontement que dans les moments les plus intimes. On sent que Sylvester Stallone avait pour idée de revenir à un style classique mais humain. L'histoire est en effet d'un grand classicisme, suivant des codes devenus clichés qui peuvent essouffler certains mais derrière se trouve un amour qu'on ne peut éviter. Stallone aime ses personnages et les fait s'aimer. On pleure devant cette fin, car on sait que Stallone, à l'instar de Clint Eastwood avec La Mule, cultive une certaine idée du cinéma classique américain fort mais humble. Ici la force est actuelle (BO parfaite, stylisation clipesque de certaines scènes) et ancienne (le schéma narratif, le retour des vieilles légendes), conciliant aussi bien les nouvelles générations que les précédentes, et l'humilité est ce que Stallone cherche à enseigner aussi bien à son protégé qu'au spectateur.
On peut regretter une baisse de rythme au milieu du film mais Creed 2 est un beau moment de cinéma qui se détache petit à petit de l'originel, comme Adonis de son père. On y va pour voir des gens se battre sur un ring, pour voir des gens vaincre la vie que l'on doit également nous-mêmes affronter dans l'espoir que notre passage de flambeau soit tout aussi assuré.