Une respiration dans l'oeuvre de Spike Lee.
En 1994, Spike Lee a déjà enchaîné une bonne demi-douzaine de films très engagés, au risque de se répéter. Alors pour Crooklyn, son septième film, il décide de prendre tout son monde à contre-pied.
Point de revendications politiques dans Crooklyn (même si on s’insulte de nègre dedans dès que possible) ni même de message pro-Noir comme d’habitude chez le petit excité, le film est un pur coming-of-age movie, porté par une actrice absolument fantastique, Zelda Harris et une bande-son qui ne tombe jamais dans le jukebox ambulant. Le casting est très performant et on notera les prestations particulièrement réussies de Delroy Lindo, Carlton Williams et Sharif Rashed. Le film parvient à manier parfaitement l’équilibre entre comédie et drame, passant avec virtuosité du rire aux larmes, tout en gardant une mise en scène cohérente. Cette cohérence se retrouve dans la longue séquence à la campagne, 15 minutes filmées en anamorphique, ce qui étire les personnages, tout ceci pour exprimer le manque de repère de Troy, l’héroïne parfaitement bien écrite par la fratrie Lee. C’est alors dommage que le film soit un peu long.
Crooklyn est une respiration bienvenue dans l’œuvre de Spike Lee, qui ne peut pourtant s’empêcher de s’offrir un rôle qui ne sert pas à grand-chose et qui lui permet de placer son petit gimmick visuel, les personnages qui marchent comme sur un tapis roulant dans un traveling bien à lui. Un très bon film.