L’originalité du Crying Freeman adapté par Christophe Gans est double. C’est d’abord le cosmopolitisme partout présent, depuis son casting international jusqu’à la musique originale qui mêle les sonorités ; se déploie devant nos yeux une œuvre hybride qui tire de cette convergences d’influences éparses une richesse des plus appréciables. C’est ensuite l’entrelacs des pulsions de vie et de mort qui saisissent le couple principal sans qu’il n’y puisse rien changer : l’attirance violente d’Emu pour celui qui aurait dû lui ôter la vie, la sensibilité à fleur de peau d’un meurtrier qui peine à cacher ses larmes et revient sans cesse vers celle qu’il aime. Au cœur du film règnent un paradoxe et, par conséquent, une dynamique efficace qui aborde les péripéties et autres retournements de situation comme autant de mises à l’épreuve soucieuses de ramener les personnages sur le droit chemin, de les raccorder à ce pour quoi ils ont été programmés.
Crying Freeman redistribue donc la liberté d’un héros viril et puissant à une cellule amoureuse interdite au sein de laquelle les rôles se voient inversés. La maestria de mise en scène, forte de ralentis splendides et de mouvements de caméra ultra-maîtrisés – un peu trop d’ailleurs, si bien que cette maîtrise formelle enferme rapidement le long métrage dans l’application d’une formule, loin de l’ambition libertaire de son postulat – confère à Emu et Yo un aspect de couple tragique digne des récits mythologiques de l’Antiquité. Une réussite.